Название | Études sur l'histoire de l'art |
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Автор произведения | Eugene Guillaume |
Жанр | Языкознание |
Серия | |
Издательство | Языкознание |
Год выпуска | 0 |
isbn | 4064066328429 |
Il n’est plus question de savoir si le Panthéon était dédié à Jupiter Vengeur: on a rectifié le texte de Pline qui avait accrédité cette erreur. On pense, et cela sur le témoignage de Dion Cassius, que le temple avait été consacré aux Dieux de la Gens Julia. Suivant Dion, Mars et Vénus y présidaient avec Jules-César. Autour d’eux, des divinités et des héros appartenant au même patronage politique et religieux y devaient avoir leurs autels, et tous ensemble formaient en quelque sorte l’Olympe domestique de la famille impériale. Auguste avait refusé d’avoir une place dans ce sanctuaire. Il avait voulu que sa statue fût au dehors, en ayant celle d’Agrippa pour pendant. De là, croit-on, les deux grandes niches qui se voient de chaque côté de la porte sous le vestibule. Telle est l’opinion généralement admise. Quelques savants vont jusqu’à nommer l’architecte du Panthéon, qui serait un certain Valérius d’Ostie. Quant à la décoration de l’édifice, il faut lire ce qu’en dit Pline, qui l’avait vue: car pour tout ce qui a été écrit et dessiné à ce sujet, son texte fait autorité, tout en restant l’objet d’un éternel commentaire: — «Agrippa, dit-il, décora le Panthéon. Diogène d’Athènesplaça sur les colonnes du temple des cariatides, qui sont considérées comme des ouvrages d’un mérite rare, aussi bien que les figures placées sur le faîte du monument; mais à cause de leur élévation celles-ci sont moins admirées.» — Ailleurs, le même auteur nous apprend que les chapiteaux des colonnes étaient en bronze de Syracuse. Enfin, d’après les traditions et l’état du portique jusqu’au pontificat d’Urbain VIII en 1623, la charpente aurait été de bronze ainsi que des voûtes placées sur les colonnes. Le Panthéon nous apparaît donc comme une œuvre de forme composite dans laquelle le bronze était combiné pour une large part avec le marbre et d’autres matériaux. Mais je remarque que pas un mot, dans Pline, n’implique l’association d’un portique rectangulaire avec un bâtiment cylindrique et que, chez l’écrivain, ni directement, ni par allusion il n’est question d’une coupole.
Les autres édifices élevés par Agrippa consistaient d’abord en une sorte de gymnase avec une étuve, ce qu’on nommait un laconicum; il était adossé au temple. Puis venaient les thermes avec leurs piscines, leurs eaux vives et leurs vastes jardins. Ces grands ouvrages avaient été construits à la fois et à la suite, non sans quelques tâtonnements. En effet, le Panthéon et le laconicum auraient été menés d’ensemble; peu après, on aurait bâti les thermes, ce qui aurait entraîné des modifications au laconicum. Avec une sagacité patiente, on est arrivé à mettre d’accord les dates assignées à la consécration de ces constructions, en interprétant les dires un peu confus des historiens et les textes lapidaires. Travail savant et délicat, d’où il résulte que la dédicace du Panthéon a eu lieu vingt-sept ans avant notre ère, l’achèvement du laconicum deux ans plus tard, et que les thermes n’auraient été livrés au public que sept ans après, soit l’an de Rome 726, dix-neuf années avant l’ère chrétienne. Tout cela est fort plausible, spécialement en ce qui concerne les thermes, qui n’auraient pu être ouverts plus tôt, l’aqueduc destiné à les alimenter n’ayant été terminé lui-même qu’en 726.
Les textes dont il faudrait établir la concordance, et qu’on rend presque contemporains, embrassent plus de deux cents ans. Ainsi, nous pouvons nous arrêter à considérer ce qu’était, dans son ensemble, le quartier du Panthéon, sous Septime-Sévère et ses premiers successeurs. Cette partie du Champ de Mars, rendue déjà magnifique par Agrippa, n’avait pas tardé à se remplir d’édifices superbes. La carte topographique de Rome, que M. Lanciani se prépare à publier, dira le dernier mot de la science sur la ville antique et en particulier sur la région dont Agrippa avait créé le sol. Mais en consultant à cet endroit les plans dressés par Canina, on voit combien le terrain avait été rapidement occupé, combien il avait attiré l’attention des empereurs, tous désireux de bâtir. Sans être astreint à regarder comme définitivement fixé le périmètre d’édifices dont l’existence est incontestée, mais qui nous sont présentés dans les conditions d’une symétrie trop absolue, on peut imaginer quel ensemble de constructions grandioses ce lieu réunissait au commencement du IIIe siècle. Devant le Panthéon s’étendait une place entourée de trois côtés d’un portique Au milieu, là où devait s’élever plus tard l’arc vulgairement appelé de la Pitié, le spectateur pouvait s’arrêter ayant en face de lui le monument lui-même avec sa masse caractéristique, les bronzes étincelants de sa couverture et les escaliers sur lesquels il s’élevait. A la droite du visiteur et bordant la place, les thermes de Néron et d’Alexandre-Sévère, entourés et ombragés d’un bois épais. A sa gauche, les thermes d’Adrien; et, de tous côtés, sur ses pas, des temples, des basiliques, des gymnases, et diverses enceintes parmi des plantations d’arbres et des fontaines. Ce quartier était bas et naturellement se prêtait à recevoir les eaux. Elles y venaient de toutes parts. Agrippa, au moyen de travaux considérables, les y avait amenées et leur avait ménagé des issues. Elles s’écoulaient; et on n’en avait que le bienfait sanitaire, le spectacle fuyant et la fraîcheur.
Chaque règne avait donc ajouté aux embellissements commencés sous Auguste, et il s’était formé autour du Panthéon une ville monumentale. L’aspect qu’elle présentait dans son ensemble devait contraster avec le reste de la cité. Tandis que le principe de l’architecture grecque prévalait au Forum, le système du plein cintre et de la voûte l’emportait alors au Champ de Mars. La coupole y faisait songer à l’Asie. Les dispositions architectoniques appropriées à des usages empruntés à l’orient, transformaient cette région, qui devait rappeler Séleucie, Antioche, Alexandrie, les métropoles de la Syrie, de la Mésopotamie, de l’Égypte.
De loin nous pouvons suivre le Panthéon à travers l’histoire. Parfois il semble oublié, anéanti peut-être? puis il apparaît de nouveau intact et surtout admiré. En effet, il a toujours été regardé comme une merveille. Sous Antonin le Pieux, il était cité parmi les plus beaux édifices; et, en cela, l’opinion n’a jamais changé. Mais sa conservation n’est pas ce qu’il offre de moins étonnant. Les monuments de toute sorte dont il était environné ont disparu; et lui, malgré l’effort des éléments et les outrages qu’il a subis de la part des barbares aussi bien que de ses admirateurs, il est encore debout. Il a perdu ses ornements de métal et son revêtement de stuc, et, à plusieurs reprises, il a fallu le débarrasser des constructions parasites qui le défiguraient. Et, cependant, tout en portant la trace de tant de ravages et de contacts désastreux, il n’a point l’aspect d’une ruine. Loin de là, avec son intégrité vénérable, il est encore vivant. Et cependant par combien de vicissitudes n’a-t-il point passé !
On voit dans Dion Cassius qu’en l’an 80, sous le règne de Titus, il fut gravement endommagé parle feu. Ce qui périt certainement alors, ce fut le monument élevé par Agrippa. Domitien le rétablit; mais trente années plus tard, du temps de Trajan, un nouvel incendie y fut allumé par la foudre. Après quelque temps, vers 123, Adrien le restaura en même temps que d’autres édifices qui en étaient proches. Enfin, au plus tôt en 203, Septime-Sévère et son fils, qu’il s’était associé, le remirent dans tout son éclat; car, comme le porte l’inscription gravée aussi sur le frontispice du monument, le temps l’avait ruiné. Le latin dit corruptum, ce qui peut impliquer quelque chose de plus que des dégâts matériels. N’aurait-il