Название | Les Rois Frères de Napoléon Ier |
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Автор произведения | Albert Du Casse |
Жанр | Документальная литература |
Серия | |
Издательство | Документальная литература |
Год выпуска | 0 |
isbn | 4064066082673 |
J'ai lu avec beaucoup d'intérêt tout ce que vous m'avez écrit, ainsi que Mme Hugo.
Mon désir le plus constant est que vous vous arrangiez de manière à être heureux, je n'ai rien négligé pour cela, l'attachement que je vous porte m'en a fait un devoir; mais, si mes vœux ne se réalisent pas, je ne dois pas vous cacher que ma volonté est que vous ne donniez pas ici un exemple scandaleux en ne vivant point avec Mme Hugo comme le public a droit de l'attendre d'un homme qui, par sa place, est tenu à donner le bon exemple.
Quel que soit le regret que j'aurais de vous voir éloigné de moi, je ne dois pas vous cacher que je préfère ce parti au spectacle qu'offre votre famille depuis trois mois.
Joseph à Julie.
Madrid, le 1er février 1812.
Ma chère amie, je n'ai rien de bon à t'écrire après la prise de Valence; la récolte a été mauvaise et le blé est très cher, il y a beaucoup de misère ici; je reçois à peine la moitié de ce qui m'avait été promis à Paris, et je serais impardonnable d'être reparti si j'avais pu prévoir l'avenir qui m'attendait dans ce pays. Les avantages que je pouvais tirer de la reddition de Valence par le grand nombre de soldats qui abandonnent l'insurrection, vont bientôt être perdus par le dénûment où je me trouve et d'argent et de moyens de m'en procurer; quelle sera la fin de tout ceci, je l'ignore et ne veux pas la prévoir: 1o l'unité dans le commandement et dans l'administration; 2o un but fixe et certain offert à toutes les provinces, pourraient encore sauver nos affaires et il faudrait que l'empereur fit encore beaucoup de sacrifices d'argent, sans cela tout ira mal et va déjà si mal que, ne pouvant rien, je dois désirer que cela finisse pour moi le plus tôt possible.
Joseph à Julie.
Madrid, le 21 février 1812.
J'ai reçu ta lettre du 28 janvier et 1er février. Je suis fâché d'apprendre que ta santé n'est pas bonne, je n'ai aucune réponse directe aux lettres que j'ai écrites, il est fâcheux que cela soit ainsi; mais il serait encore plus fâcheux pour moi que je crusse mériter d'être traité comme je le suis, je désire que tout ce qui se passe finisse bien, je le désire sincèrement plus que je ne l'espère.
Ma santé n'est pas très bonne, cependant je serais heureux de penser que la tienne fût de même.
Joseph à Julie.
Madrid, 7 mars 1812.
Ma chère amie, je reçois ta lettre du 14; je n'ai aucune nouvelle de Paris, tu ne me dis rien des événements qui sont arrivés ou dont nous sommes menacés, ma position ici est impitoyable; que je sauve l'honneur, je regrette peu le reste.
Adieu, ma chère amie, écris-moi la vérité et embrasse nos enfants.
Vers cette époque une mesure prise bien tard sans doute, mais enfin prise par l'empereur, prêt à partir pour le Nord, rendit un peu de courage à Joseph et lui donna quelque espérance. Il apprit que son frère plaçait sous son commandement unique toutes les troupes en Espagne et lui donnait pour major-général le maréchal Jourdan. Le roi se mit immédiatement à la tête de ses armées, mais il s'aperçut bientôt de la difficulté qu'il aurait à se faire obéir des commandants des divers corps, accoutumés à être indépendants.
Dès qu'il fut entré en campagne, Joseph écrivit à la reine un grand nombre de lettres fort importantes. Il lui manda de Valence le 9 septembre 1812:
Ma chère amie, tu pourras concevoir par la copie ci-jointe l'enchaînement des événements qui m'ont forcé à quitter Madrid, la résistance qu'a éprouvée l'exécution de mes ordres au Nord et au Midi, la précipitation qu'a mis l'armée de Portugal retirée derrière le Duero à attaquer l'armée anglaise avant l'arrivée des secours qui lui étaient annoncés du Nord et du Centre. Masséna arrive; s'il amène des troupes, si on envoie de l'argent, si les généraux qui ne veulent pas obéir et qui s'isolent dans leurs provinces sont rappelés, les affaires se rétabliront bientôt.
Je me porte très bien, je t'embrasse avec mes enfants, je désire que vous vous portiez aussi bien que moi et vous revoir bientôt, car la vie se passe.
Si l'empereur ne rappelle pas les généraux du Nord et du Midi, il n'y a rien de bon à espérer dans un état de choses où il faut un commandement prompt, absolu, et où l'impunité encourage à la désobéissance et perpétuera les malheurs jusqu'à la perte totale de ce pays.
À cette lettre était jointe la copie de la lettre de Joseph à Berthier, en date du 4 septembre, qui ne se trouve pas aux Mémoires et que voici. Elle est relative à la bataille de Salamanque.
Valence, le 4 septembre 1812.
J'apprends par une voie indirecte que le conseil des ministres ayant eu connaissance des résultats de l'action qui a eu lieu le 21 juillet dernier aux environs de Salamanque entre l'armée de Portugal et l'armée anglaise, avait donné des ordres pour faire passer en Espagne des renforts et remis à M. le prince d'Essling le commandement de l'armée de Portugal.
En adressant à V. A. S. mes remerciements de l'empressement qu'elle et le conseil des ministres ont mis à prendre cette mesure, je crois devoir lui communiquer directement un sommaire des événements et de la situation des affaires militaires avant et après cette époque, ma correspondance avec le ministre de la guerre en contient les détails en quelque sorte jour par jour, mais dans la crainte qu'elle ne lui soit pas parvenue, il me paraît utile d'en rassembler ici les principaux faits.
Le maréchal duc de Raguse ne s'étant pas cru en mesure d'attaquer les Anglais, après qu'ils eurent passé l'Agueda le 12 juin, se retira successivement entre la Tormès et le Duero et finalement passa sur la rive droite de ce fleuve.
L'armée de Portugal resta dans cette position en rappelant à elle toutes ses divisions.
L'armée anglaise demeura en observation sur la rive gauche du Duero, et ne fit aucune tentative pour le passer.
Il était aisé de prévoir que le sort de l'Espagne pourrait dépendre d'une affaire qui paraissait inévitable et qu'il était de la plus haute importance de mettre le duc de Raguse en état de combattre avec les plus grandes probabilités de succès.
Je pressai des secours de toutes parts, mais mes ordres ne furent pas exécutés, le général en chef de l'armée du Midi[32] se refusa aux dispositions que j'avais prescrites, et ce ne fut qu'après beaucoup d'hésitations que celui de l'armée du Nord se détermina à faire partir sa cavalerie et son artillerie que je lui avais ordonné d'envoyer au duc de Raguse.
Réduit par conséquent à mes propres forces, je pris le parti d'évacuer toutes les provinces du Centre; je ne laissai de garnisons qu'à Madrid et à Tolède et je formai un corps de 14,000 hommes avec lequel je partis de Madrid le 21 pour me porter sur le Duero et effectuer ma jonction avec l'armée du Portugal.
J'appris en route que M. le maréchal duc de Raguse avait déjà passé ce fleuve, le 18, à Tordesillas, que l'armée anglaise s'était repliée sur Salamanque; je continuai à marcher avec la confiance d'opérer très promptement ma jonction sur la rive gauche du Duero.
Mais au moment où cette jonction allait avoir lieu, je reçus le 25 juillet, à Blasca-Sancho, des lettres de M. le maréchal Marmont et de M. le général Clausel qui m'annonçaient qu'il y avait eu le 22 une affaire générale; comme ces lettres fixent d'une manière précise les événements de cette journée où M. le maréchal duc de Raguse, à la veille de recevoir des renforts qu'il attendait depuis un mois, a engagé volontairement une action dont les résultats ont été si graves, j'en adresse une copie à Votre A. S.[33]
L'armée du Portugal faisait sa retraite en toute hâte et sans chercher à s'appuyer des forces que j'avais avec moi, je ne pouvais plus que me retirer et tout ce qui me restait à faire était de tenter de ralentir la poursuite de l'ennemi par ma présence en attirant son attention sur moi.
Je