Название | Les Rois Frères de Napoléon Ier |
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Автор произведения | Albert Du Casse |
Жанр | Документальная литература |
Серия | |
Издательство | Документальная литература |
Год выпуска | 0 |
isbn | 4064066082673 |
Le roi Joseph était rentré en grâce près de Napoléon, soit que l'Empereur le préférât à ses autres frères, soit qu'il eût en lui plus de confiance qu'en Louis et en Jérôme. L'empereur continua à traiter ces derniers avec rigueur, ne voulant les voir ni l'un ni l'autre et écrivant même le 2 février 1814 à l'Impératrice pour lui défendre de recevoir le roi et la reine de Westphalie. Ce fait résulte de la lettre suivante:
Marie-Louise à Joseph.
Paris, 3 février 1814.
Je reçois à l'instant une lettre de l'Empereur du 2 février qui me défend, comme réponse à la mienne, de recevoir sous aucun prétexte le roi et la reine de Westphalie, ni en public, ni incognito.
Je vous prierai donc, mon cher frère, de leur peindre tous les regrets que j'ai de ne pouvoir les voir demain et de croire à la sincère amitié avec laquelle je suis, mon cher frère,
Votre affectionnée sœur.
Louise.
À la fin de février 1814, seulement, Napoléon voulut bien se rapprocher de ses frères Louis et Jérôme. Il écrivit à Joseph, de Nogent-sur-Seine, le 21 février, cette curieuse lettre[41]:
Mon frère, voici mes intentions sur le roi de Westphalie: je l'autorise à prendre l'habit de grenadier de ma garde, autorisation que je donne à tous les princes français (vous le ferez connaître au roi Louis. Il est ridicule qu'il porte encore un uniforme hollandais). Le roi donnera des congés à toute sa maison westphalienne. Ils seront maîtres de retourner chez eux ou de rester en France. Le roi présentera sur-le-champ à ma nomination trois ou quatre aides de camp, un ou deux écuyers et un ou deux chambellans, tous Français, et pour la reine, deux ou trois dames françaises pour l'accompagner. Elle se réservera de nommer dans d'autres temps sa dame d'honneur. Tous les pages de Westphalie seront mis dans des lycées et porteront l'uniforme des lycées. Ils y seront à mes frais. Un tiers sera mis au lycée de Versailles, un tiers au lycée de Rouen et l'autre tiers au lycée de Paris. Immédiatement après, le roi et la reine seront présentés à l'Impératrice et j'autorise le roi à habiter la maison du cardinal Fesch, puisqu'il paraît qu'elle lui appartient, et à y établir sa maison. Le roi et la reine continueront à porter le titre de roi et reine de Westphalie, mais ils n'auront aucun Westphalien à leur suite. Cela fait, le roi se rendra à mon quartier-général d'où mon intention est de l'envoyer à Lyon prendre le commandement de la ville, du département et de l'armée; si toutefois il veut me promettre d'être toujours aux avant-postes, de n'avoir aucun train royal, de n'avoir aucun luxe, pas plus de 15 chevaux, de bivouaquer avec sa troupe, et qu'on ne tire pas un coup de fusil qu'il n'y soit le premier exposé. J'écris au Ministre de la Guerre et je lui ferai donner des ordres. Il pourrait, pour ne pas perdre de temps, faire partir pour Lyon sa maison, c'est-à-dire une légère voiture pour lui, une voiture de cuisine, quatre mulets de cantine et deux brigades de six chevaux de selle, un seul cuisinier, un seul valet de chambre avec deux ou trois domestiques, et tout cela composé uniquement de Français. Il faut qu'il fasse de bons choix d'aides de camp, que ce soit des officiers qui aient fait la guerre, qui puissent commander des troupes, et non des hommes sans expérience comme les Verdrun, les Brongnard et autres de cette espèce. Il faut aussi qu'il les ait tout de suite sous la main. Enfin il faudrait voir le Ministre de la Guerre et se consulter pour lui choisir un bon état-major.
Votre affectionné frère.
Dans une autre lettre à Joseph du 7 février, on lit:
Faites donc cesser ces prières de 40 heures et ces Miserere; si l'on nous faisait tant de singeries, nous aurions tous peur de la mort. Il y a longtemps que l'on dit que les prêtres et les médecins rendent la mort douloureuse.
L'Empereur termine celle du 9 février par ces mots:
Priez la Madona des armées qu'elle soit pour nous, Louis qui est un saint, peut s'engager à lui donner un cierge allumé.
Ces deux passages ont été supprimés dans les Mémoires et à la correspondance.
La veille, le 8 février, Napoléon avait envoyé à son frère aîné une très longue lettre, des plus importantes, qui explique, avec une autre du 15 mars, et justifie pleinement la conduite de Joseph au 31 mars. Plusieurs passages de la lettre du 8 février, relatifs au roi Louis, ont été supprimés dans les ouvrages qui ont paru; nous croyons devoir rétablir cette lettre in-extenso:
Nogent, le 8 février 1814, 4 heures du matin.
Mon frère, j'ai reçu votre lettre du 7 à 11 heures du soir; elle m'étonne beaucoup, j'ai lu la lettre du roi Louis qui n'est qu'une rapsodie; cet homme a le jugement faux et met toujours à côté de la question.
Je vous ai répondu sur l'événement de Paris pour que vous ne mettiez plus en question la fin, qui touche à plus de gens qu'à moi. Quand cela arrivera je ne serai plus; par conséquent ce n'est pas pour moi que je parle. Je vous ai dit pour l'Impératrice et le roi de Rome et notre famille ce que les circonstances indiquent et vous n'avez pas compris ce que j'ai dit. Soyez bien certain que si le cas arrivait, ce que je vous ai prédit arrivera infailliblement, je suis persuadé qu'elle-même a ce pressentiment[42].
Le roi Louis parle de la paix, c'est donner des conseils bien mal à propos. Du reste je ne comprends rien à votre lettre. Je croyais m'être expliqué avec vous, mais vous ne vous souvenez jamais des choses et vous êtes de l'opinion du premier homme qui parle et qui vous reflète cette opinion.
Je vous répète donc en deux mots que Paris ne sera jamais occupé de mon vivant, j'ai droit à être cru par ceux qui m'entendent.
Après cela, si, par des circonstances que je ne puis prévoir, je me portais sur la Loire, je ne laisserai pas l'Impératrice et mon fils loin de moi, parce que, dans tous les cas, il arriverait que l'un et l'autre seraient enlevés et conduits à Vienne, que cela arriverait bien davantage si je n'existais plus. Je ne comprends pas comment, pendant ces menées auprès de votre personne, vous couvrez d'éloges si imprudents la proposition de traîtres si dignes de ne conseiller rien d'honorable; ne les employez jamais dans un cas, même le plus favorable[43]. C'est la première fois depuis que le monde existe, que j'entends dire qu'en France une population de (illisible) âmes assiégée ne pouvait pas vivre trois mois. D'ailleurs nul n'est tenu à l'impossible, je ne peux plus payer aucun officier et je n'ai plus rien.
J'avoue que votre lettre du 7 (février) à quatre heures du soir m'a fait mal, parce que je ne vois aucune tenue dans vos idées et que vous vous laissez aller aux bavardages d'un tas de personnes qui ne réfléchissent pas. Oui, je vous parlerai franchement: si Talleyrand est pour quelque chose dans cette opinion de laisser l'Impératrice à Paris dans le cas où l'ennemi se rapprocherait, c'est trahir; je vous le répète, méfiez-vous de cet homme; je le pratique depuis seize ans, j'ai même eu de la faveur pour lui, mais c'est sûrement le plus grand ennemi de notre maison, à présent que la fortune l'a abandonnée depuis quelque temps. Tenez-vous aux conseils que j'ai donnés, j'en sais plus que ces gens-là.
S'il arrivait bataille perdue et nouvelle de ma mort, vous en seriez instruit avant ma maison: faites partir l'Impératrice et le roi de Rome pour Rambouillet; ordonnez au Sénat, au Conseil d'État et à toutes les troupes de se réunir sur la Loire. Laissez à Paris un préfet et une commission impériale, ou des maires.—Je vous ai fait connaître que je pensais que Madame et la reine de Westphalie pourraient bien rester à Paris logées chez Madame. Si le vice-roi est revenu à Paris, vous pourrez aussi l'y laisser, mais ne laissez jamais tomber l'Impératrice et le roi de Rome entre les mains de l'ennemi. Soyez certain que dès ce moment l'Autriche, étant désintéressée, l'emmènerait à Vienne avec un bel apanage, et sous le prétexte de voir l'Impératrice heureuse on ferait adopter aux Français tout ce que le régent d'Angleterre et la Russie pourraient leur suggérer. Tout parti se trouverait par là détruit.
Au lieu que, dans le cas opposé, l'esprit national du grand nombre d'intéressés à la révolte rendrait tout résultat