Les Rois Frères de Napoléon Ier. Albert Du Casse

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Название Les Rois Frères de Napoléon Ier
Автор произведения Albert Du Casse
Жанр Документальная литература
Серия
Издательство Документальная литература
Год выпуска 0
isbn 4064066082673



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profit.

      Ainsi on lit dans une lettre de Joseph à son frère, en date du 28 janvier 1809:

      J'envoie au maréchal Bessières, pour être employé dans un commandement où il puisse vivre comme un autre officier, le général La R..... qui exigeait 10,000 francs par mois en sus de ses appointements, pour vivre à Madrid, et qui a eu la sottise de frapper à toutes les portes pour cela. Voici la lettre qu'il a écrite au corrégidor. Je l'ai remplacé par le général Blondeau qui sera plus modeste.

      Joseph crut devoir quitter Madrid pour se rapprocher de la France dont il attendait des renforts. Napoléon entra dans la Péninsule, prit la direction des affaires militaires. Le roi le rejoignit avec sa garde, mais l'empereur ne voulut pas avoir son frère près de lui à l'armée et le relégua sur les derrières, puis à Burgos. Cette façon d'agir choqua Joseph et ses ministres. Il s'en plaignit dans une lettre pleine de noblesse écrite à son frère le 10 novembre, de Miranda[18]. Il ne put rien obtenir et fut sur le point de revenir en France abandonnant le trône des Espagnes. Il se résigna à attendre pour ne pas être le premier à jeter la pierre à Napoléon. Ce dernier entra à Madrid le 4 décembre 1808, et changeant de nouveau de politique à l'égard de son frère et de l'Espagne, dans la pensée secrète de s'emparer de ce royaume et d'en annexer les provinces du Nord, il proposa à Joseph de lui donner la couronne d'Italie. Ce dernier, fatigué de ces changements perpétuels, refusa, eut plusieurs conférences avec l'empereur et revint dans sa capitale où il fit une entrée solennelle le 22 janvier 1809.

      Dès son retour à Paris, Napoléon montra de nouveau de la défiance à son frère Joseph, recommença à lui reprocher sa façon de gouverner, mais sans vouloir le mettre à même, en lui en donnant les moyens, de sortir de l'impasse dans laquelle il le tenait. Le 9 février 1809, Joseph lui écrivit:

      Vous écoutez sur les affaires de Madrid ceux qui sont intéressés à vous tromper, vous n'avez pas en moi une entière confiance. Et plus loin: Je serai roi comme doit l'être le frère et l'ami de Votre Majesté, ou bien je retournerai à Mortefontaine[19] où je ne demanderai rien que de vivre sans humiliation et de mourir avec la tranquillité de ma conscience, etc.

      Les choses restèrent dans cet état en Espagne jusqu'au milieu de 1809; mais alors elles prirent, pour le roi, une tournure des plus fâcheuses, ainsi que cela résulte des lettres de Joseph à sa femme, la reine Julie. Nous donnerons plus loin ces intéressantes lettres; mais, avant, un mot encore sur les exactions de quelques généraux français en Espagne et sur quelques affaires de l'époque, relatives à Joseph. Le 24 février 1810, il écrit de Xérès au prince de Neufchâtel:

      La lettre de Votre Altesse me fait croire que l'empereur me croit instruit d'une contribution de quinze cent mille francs levée par le général Loison, j'aurais désiré savoir en son temps si l'empereur l'a ordonnée et je prie S. M. de réprimer un pareil abus de pouvoir, si elle ne l'a pas autorisée. Tous mes efforts échoueront contre des vexations semblables que se permettraient des généraux particuliers; le général Kellermann est aussi dans ce cas; l'ordre est impossible si des généraux de division font ce que je ne me permettrais pas de faire et S. M. I. et R. est trop juste pour le vouloir.

      Tout est ici au mieux; les provinces de l'Andalousie sont pacifiées, parce que la justice y règne et que je n'ai qu'à me louer des généraux qui y sont.

      Je prie Votre Altesse d'agréer mon sincère attachement.

      Les ordres ont été donnés au général Loison pour les 100,000 francs.

      Le 2 mars il prévient l'empereur qu'il fait venir près de lui sa femme et ses enfants et ajoute:

      Kellermann, Ney, Thiébaud sont des gens qui ruineront le pays qu'ils doivent administrer, etc.

      Tout en signalant les officiers qui se permettaient des exactions, Joseph aimait à rendre justice aux gens honnêtes. Ainsi le 21 avril 1810, il écrit de Madrid au général Reynier:

      Je reçois la lettre et le rapport que vous avez bien voulu m'adresser le 13. J'ai donné l'ordre de vous renvoyer tous vos détachements, ils sont en marche. Je suis très reconnaissant de tous les soins que vous vous donnez pour le meilleur service public et reconnais bien, dans vous, les principes d'un honnête homme et l'intérêt d'un ami.

       Le lendemain 24, dans une longue lettre à l'empereur, Joseph signale encore les autres généraux pillards. Il dit: «Il n'y a pas de doublons exportés par Ney ou par Kellermann qui ne coûte une tête française.» De son côté dans une lettre à Berthier, datée du 17 septembre 1810 et qui se trouve à la Correspondance, Napoléon signale Kellermann et Ney. Enfin, le 27 octobre, il ordonne à Berthier de demander au ministre d'Espagne des notes précises sur les abus reprochés à Kellermann.

      Lors du mariage de Napoléon avec l'archiduchesse Marie-Louise, le roi d'Espagne écrivit et fit porter par son chambellan les deux lettres suivantes:

      Monsieur mon frère,

      Connaissant la bienveillance dont Votre M. I. et R. a honoré M. Azanza, duc de Santa-Fé, je l'ai nommé mon ambassadeur extraordinaire pour porter à V. M. mes félicitations à l'occasion du mariage de V. M. I. et R. et de S. A. I. et R. Mme l'archiduchesse Marie-Louise.

      V. M. me connaît trop intimement pour ne pas deviner à l'avance tous les mouvements de mon cœur, je suis toutefois bien aise de saisir cette circonstance solennelle pour assurer V. M. I. de la joie que j'ai éprouvée par l'heureux lien qu'elle contracte dans la vue de perpétuer le bonheur de tant de nations. V. M. trouvera ainsi le bonheur que la nature accorde au commun des hommes.

      Je supplie V. M. I. et R. d'agréer ces vœux et de les regarder dès aujourd'hui comme des présages qui ne la tromperont pas, ce sont ceux de son premier ami à qui le cœur de V. M. I. est plus connu qu'elle ne pense.

      Je prie V. M. d'agréer l'hommage de ma tendre amitié.

      De V. M. I. et R.,

       Le bon et affectionné frère.

      Joseph à Marie-Louise.

      Grenade, le 28 mars 1810.

      Madame ma sœur, je prie Votre Majesté impériale d'agréer mes félicitations les plus sincères, à l'occasion de son mariage avec S. M. l'empereur des Français, roi d'Italie. Je fais des vœux bien vifs pour le bonheur d'une union d'où dépend le bonheur de tant de nations.

      Ne pouvant jouir, par moi-même, de l'avantage de présenter à V. M. I. et R. l'expression de mes sentiments, je supplie V. M. d'agréer tout ce que lui dira de ma part M. le duc de Santa-Fé que j'ai chargé de cette honorable mission. Veuillez, Madame ma sœur, etc.[20].

      Le 2 mai, Joseph écrivit de Séville au duc de Feltre, ministre de la guerre de Napoléon:

      Monsieur le duc, j'ai reçu la lettre par laquelle vous me proposez, de la part de S. M. I. et R., de faire entrer en Espagne le régiment espagnol formé à Avignon. Je juge cette opération fort utile; elle détruira la croyance, généralement répandue, que les régiments espagnols sont destinés à servir au delà des Pyrénées, et cette croyance rend difficile la formation de tout nouveau corps. Je vous prie, Monsieur le duc, de remercier S. M. I. et R. et de vouloir bien hâter l'envoi en Espagne de ce régiment[21].

      Nos affaires devant Cadix vont bien; la tranquillité se rétablit dans ces provinces. Le 4e corps est entré à Murcie. Le 2e corps a battu l'ennemi qu'il avait devant lui entre Merida et Badajoz.

      Vous connaissez, Monsieur le duc, l'ancien et sincère attachement que je vous ai voué.

      Votre affectionné.

      Le 8 février 1810, pendant son voyage en Andalousie, Joseph, croyant être très agréable à Napoléon, lui écrivit de Séville:

      Sire, je m'empresse de vous annoncer que je viens de recevoir, des mains de l'évêque et du chapitre de cette ville, les aigles perdues à Baylen. Je les envoie à V. M. par un officier.

      L'empereur se borna à faire