Название | Les Rois Frères de Napoléon Ier |
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Автор произведения | Albert Du Casse |
Жанр | Документальная литература |
Серия | |
Издательство | Документальная литература |
Год выпуска | 0 |
isbn | 4064066082673 |
Milan, 20 décembre à minuit 1807.
À l'époque où cette lettre fut écrite, l'empereur commençait à se préoccuper des affaires d'Espagne. L'héritier présomptif du trône, Ferdinand, fils de Charles IV, lui avait fait faire des ouvertures pour obtenir la main d'une Bonaparte. Napoléon avait eu l'idée de donner à ce prince, prêt à se jeter dans ses bras, la fille de Lucien. C'est ce qui explique la lettre ci-dessus.
Au reçu de cette lettre, Joseph écrivit à Lucien qui lui répondit et dont il envoya la lettre à l'empereur le 31 décembre avec celle-ci:
Sire,
Je vous envoye la réponse que j'ai reçue de Lucien, il veut mener sa fille lui-même jusqu'à Pescara où il la remettra à la personne que vous aurez chargée de la conduire à Milan. J'ai fait inutilement l'impossible pour obtenir davantage de lui, pour son propre bien, pour celui de sa famille, et pour répondre aux vues paternelles de Votre Majesté.
Sa femme n'est pas décidément enceinte, ce que l'on avait dit n'est pas vrai.
Bientôt, en vertu des ordres de l'empereur, eut lieu l'expédition de Rome et la prise de possession de la ville éternelle par les troupes du général Miollis, le Saint-Père s'étant refusé à observer le blocus continental. Lucien se trouvait encore à Rome. Il écrivit à Joseph pour le prier de demander à l'empereur l'autorisation de se retirer près de Naples. Joseph manda à l'empereur le 4 février 1808:
Je reçois vos lettres du 26. Nos troupes sont entrées à Rome. Lucien me demande à se retirer dans une campagne aux environs de Naples avec sa famille; il me dit qu'il n'est pas en sûreté à Rome, que la populace croit qu'il a été décidé par Votre Majesté, lors de son entretien avec elle à Mantoue, que les États du Pape lui seraient donnés. Je lui réponds qu'il ne m'est pas possible d'y voir sa femme, que je l'y verrai avec mes nièces si cela est utile à sa santé, que je croyais devoir vous en écrire, que les troupes françaises étant à Rome, je ne voyais pas ce qu'il avait à craindre s'il voulait y rester.
Le 11 mars, l'empereur répondit de Saint-Cloud à Joseph:
Mon frère, Lucien se conduit mal à Rome, jusqu'à insulter les officiers romains qui prennent parti pour moi, et se montrer plus romain que le pape. Je désire que vous lui écriviez de quitter Rome et de se retirer à Florence ou à Pise. Je ne veux point qu'il continue à rester à Rome, et s'il se refuse à ce parti je n'attends que votre réponse pour le faire enlever. Sa conduite a été scandaleuse, il se déclare mon ennemi et celui de la France; s'il persiste dans ces sentimens, il n'y a de refuge pour lui qu'en Amérique. Je lui croyais de l'esprit, mais je vois que ce n'est qu'un sot. Comment à l'arrivée des troupes françaises pouvait-il rester à Rome? Ne devait-il pas se retirer à la campagne? Bien plus, il s'y met en opposition avec moi. Cela n'a pas de nom. Je ne souffrirai pas qu'un Français et un de mes frères soit le premier à conspirer et à agir contre moi avec la prêtraille.
Votre affectionné frère.
L'empereur exigea que son frère Lucien quittât Rome pour aller s'établir avec les siens à Florence, et Joseph fut chargé de veiller à ce changement de résidence qui eut lieu à la fin d'avril 1808.
Lucien, fatigué des tracas que lui suscitait Napoléon, fut sur le point de se rendre en Amérique avec les siens. Il fit part de ce projet à l'empereur et à Joseph. Ce dernier lui répondit le 15 mai 1808:
J'ai reçu ta lettre, mon cher Lucien, j'espère que la réponse que tu auras attendue de l'empereur te fera changer de résolution et que tu pourras rester en Europe. Je fais des vœux pour que cela soit ainsi et que tu sois plus heureux dans tes relations directes que tu ne l'as été par mon intermédiaire.
S'il en était autrement et que tu partisses réellement, ce qui me paraît un événement déplorable, tu ne dois pas douter que je ne remplisse tes vues. Je t'embrasse bien tendrement avec ta famille et j'espère que l'immensité des mers ne m'ôtera pas la possibilité de t'embrasser en réalité bientôt.
Ce projet, abandonné alors, fut repris par Lucien en août 1810. Le 10 de ce mois, il s'embarqua pour l'Amérique avec sa famille à bord du trois-mâts l'Hercule, frété par lui pour le voyage. Le bâtiment avait à peine dépassé la Sardaigne que, rencontré par les croisières anglaises, il fut capturé. Lucien et les membres de sa famille, déclarés prisonniers de guerre, furent conduits à Malte où ils arrivèrent le 24 août, puis transférés en Angleterre où ils débarquèrent le 28 décembre. Ils furent relégués à Ludlow (principauté de Galles).
Pendant son règne à Naples, Joseph eut encore à supporter, à plusieurs reprises, des rebuffades de son frère; ainsi le 12 novembre 1807, à propos de l'expédition de Sicile, Napoléon lui écrivit de Fontainebleau:
Mon frère, je vois par votre lettre du 3 que vous avez 74,000 hommes soit Français, soit Napolitains, soit Suisses; et cependant, avec ces forces, vous n'êtes pas maître de Reggio et de Scylla; cela est par trop honteux. Je vous réitère de prendre Reggio et Scylla; si vous ne le faites pas, j'enverrai un général pour commander mon armée, ou je retirerai mon armée du royaume de Naples. Quant aux polissons que vous avez autour de vous, qui n'entendent rien à la guerre et qui donnent des avis de l'espèce que je vois dans les mémoires qu'on me met sous les yeux, vous devriez m'écouter de préférence[12]. Quand votre général est venu me trouver à Warsovie, je lui ai déjà dit alors: comment souffrez-vous que les Anglais s'établissent à Reggio et à Scylla? Vous n'avez à combattre que quelques brigands; et les Anglais communiquent avec eux et occupent les points les plus importants du continent d'Italie. Cela me révolte. Cette occupation d'ailleurs tranquillise les Anglais sur la Sicile; ils n'ont rien à craindre tant qu'ils ont ces deux points, et dès lors leurs troupes de Sicile peuvent entreprendre impunément tout ce qu'elles veulent. Mais il paraît, vous et vos généraux, que vous vous estimez heureux que les Anglais veuillent bien vous laisser tranquilles dans votre capitale. Ils ont 8,000 hommes et vous en avez 74,000. Depuis quand les Français sont-ils si moutons et si inertes? Ne répondez à cette lettre qu'en m'apprenant que vous avez fait marcher des troupes et que Reggio et Scylla m'appartiennent. Avec l'armée que vous avez, je voudrais non seulement défendre le royaume de Naples et prendre Reggio et Scylla, mais encore garder les États du Pape et avoir les trois quarts de mes troupes sur l'Adige. Du reste, vous n'avez des brigands dans le royaume de Naples que parce que vous gouvernez mollement. Songez que la première réputation d'un prince est d'être sévère, surtout avec les peuples d'Italie. Il faut aussi en chercher la cause dans le tort qu'on a eu de ne point captiver les prêtres, en ce que l'on a fait trop tôt des changemens; mais enfin, cela n'autorise pas mes généraux à souffrir qu'en présence d'une armée aussi puissante les Anglais me bravent. Je ne me donne pas la peine de vous dire comment il faut disposer vos troupes; cela est si évident. Parce que le général Reynier a eu un événement à Meida[13], ils croient qu'on ne peut aller à Reggio qu'avec 100,000 hommes. Il est permis de n'être pas un grand général, mais il n'est pas permis d'être insensible à un tel déshonneur. Je préférerais apprendre la mort de la moitié de mes soldats et la perte de tout le royaume de Naples, plutôt que de souffrir cette ignominie. Pourquoi faut-il que je sois obligé de vous dire si fortement une chose si simple?—Quand vous enverrez 10,000 hommes à Reggio et à Scylla, et que vous en conserverez 6,000 à Cassano et à Cosenzia, que diable craignez-vous de toutes les armées possibles de l'Angleterre? Quant à Naples, la moitié de vos gardes suffit pour mettre la police dans cette ville, et pour la défendre contre qui que ce soit. Je suppose que vous n'aurez pas laissé Corfou sans le 14e, et que vous avez fait exécuter ponctuellement les ordres que je vous ai donnés. Vous avez une singulière manière de faire. Vous tenez vos troupes dans les lieux où elles sont inutiles, et vous laissez les points les plus importants sans défense.—Votre femme est venue me voir hier. Je l'ai trouvée si bien portante que j'ai été scandalisé