Название | Les Rois Frères de Napoléon Ier |
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Автор произведения | Albert Du Casse |
Жанр | Документальная литература |
Серия | |
Издательство | Документальная литература |
Год выпуска | 0 |
isbn | 4064066082673 |
Lorsque l'Empereur revint en France, en mars 1815, son frère, prévenu, accourut et put le rejoindre à Paris. Après Waterloo, il l'accompagna à Rochefort, essaya vainement d'obtenir de lui de prendre sa place à l'île d'Aix pendant que lui-même, Napoléon, passerait en Amérique. L'Empereur refusa et voulut se confier aux Anglais, les considérant comme de nobles et loyaux ennemis. Joseph, plus sage et plus heureux, put gagner New-York et se fixa, l'hiver à Philadelphie, l'été sur les bords de la Delaware dans une belle propriété nommée Pointe-Breeze qu'il acheta.
On a vu quelles étaient les intentions de Joseph en quittant l'Espagne (lettre du 1er juillet 1813 à la reine Julie) relativement à l'argenterie et aux quelques valeurs que son trésorier, M. Thibault, avait pu sauver, et qui étaient parvenues à Bayonne. Cependant, par la suite, des ministres espagnols ne craignirent pas d'accuser le Roi d'avoir détourné à son profit les diamants de la couronne.
Voici la vérité sur ce fait:
Joseph avait, comme roi d'Espagne, une liste civile d'un million par mois. Il devait toucher 500,000 fr. de l'Empereur et 500,000 fr. du trésor espagnol. La plupart du temps, Napoléon ne payait pas son frère; en outre, le trésor d'Espagne étant obéré n'avait pas d'argent pour payer les 500,000 fr. mensuels. Dans ce cas, le ministre des Finances faisait estimer, par des experts du pays, des diamants pour la dite somme, et les remettait aux mains de Joseph. Ces diamants lui appartenaient donc bien légitimement, et l'on a vu par sa correspondance avec sa femme dans quel état de dénuement le malheureux prince était revenu en France. On a vu qu'il n'avait pas hésité à emprunter à son beau-frère, Marius Clary, pour pouvoir donner de l'argent aux serviteurs qui l'avaient accompagné sur la terre de France et leur permettre de se rapatrier; on a vu même qu'il n'avait pas voulu détourner, à son profit, une obole de l'argent provenant de la vente de l'argenterie de la couronne, ce qu'il eût pu faire au lieu d'emprunter pour les Espagnols qui l'avaient suivi. L'accusation portée contre lui tombe donc d'elle-même. D'ailleurs une partie de ces diamants, en vertu de l'article XI du traité de Bayonne, avait été emportée par Ferdinand, ainsi que nous l'avons dit plus haut.
L'Empereur Napoléon Ier, pendant les années prospères de son règne, alors qu'il était l'arbitre des destinées de l'Europe, avait reçu des souverains des lettres auxquelles il attachait une grande importance. Il fit faire, dans son cabinet, deux copies de ces 250 à 300 documents précieux et déposa les originaux aux mains du duc de Bassano, secrétaire d'État au département des Affaires étrangères.
En 1815, après Waterloo, avant de quitter l'Élysée pour se rendre à la Malmaison, il dit à son frère Joseph, lequel demeurait alors rue du Faubourg-Saint-Honoré, 33 (aujourd'hui ambassade d'Angleterre), qu'il venait d'envoyer à son hôtel une copie authentique des lettres que les divers souverains lui avaient adressées pendant le temps de sa prospérité, qu'il le priait de la conserver précieusement. Joseph lui ayant fait observer qu'il aimerait mieux avoir les originaux: «Non, répondit Napoléon, cela ne vous regarde pas, c'est l'affaire de Maret (duc de Bassano), c'est son droit, il sait ce qu'il doit en faire.»
De retour à son hôtel, le roi Joseph trouva en effet les copies dans son cabinet. Le Prince, se rendant à la Malmaison pour faire ses adieux à son frère, chargea son secrétaire, M. de Presle, de diviser ses propres papiers, de les mettre avec ces copies de lettres des souverains dans des malles au milieu d'effets, et de les envoyer chez des personnes où ces documents seraient en sûreté et pourraient échapper aux recherches de la police.
Joseph se rendit à Cherbourg, vit son frère à l'île d'Aix, partit pour New-York, se fixa sur les bords de la Delaware, et ne s'occupa plus de ces papiers. En 1818, Napoléon lui fit dire de Sainte-Hélène, par le docteur O'Méara, de publier sa correspondance avec les souverains, comme étant la meilleure réponse aux calomnies que l'on répandait sur lui et le meilleur moyen d'établir, à l'aide de documents historiques incontestables, le parallèle entre sa conduite et celle des souverains alliés.
Joseph écrivit à son secrétaire, M. de Presle, alors en Europe, de lui expédier les dix caisses dans lesquelles ses papiers avaient été placés. Les caisses arrivèrent en Amérique, mais le Roi y chercha vainement la copie des lettres des souverains. M. de Presle déclara qu'il n'avait plus retrouvé ces copies dans la boîte où il les avait cachées, bien que la clef ne l'eût pas quitté. Joseph écrivit en Europe, fit démarches sur démarches, aucune n'aboutit.
Maintenant, essayons de suivre la route qu'ont prise les originaux et les copies de ces lettres des souverains:
1o Les originaux, laissés aux mains du duc de Bassano.
Le duc de Bassano partant pour l'exil, en 1815, fit enfermer ces papiers (a-t-il déclaré) dans des caisses en fer-blanc qu'il fit cacher dans un château vendu depuis. De retour de l'exil, le duc ne retrouva plus l'endroit où les boîtes avaient été enfouies par son jardinier. Ce jardinier lui-même était mort.
Il n'en est pas moins positif que ces documents furent en tout ou en partie vendus en Angleterre en 1822, à Londres, chez le libraire Murray. Les lettres de l'empereur de Russie furent cédées à l'ambassadeur, M. de Liéven, pour la somme de 250,000 fr. Ces lettres avaient été offertes d'abord au gouvernement anglais qui avait refusé d'en faire l'acquisition. On trouvera jointes ici plusieurs lettres et notes relatives à ces originaux.
2o Celle des deux copies qui fut emportée par l'empereur Napoléon Ier lui fut volée à Cherbourg avec une caisse d'argenterie, sans que l'on ait jamais pu découvrir l'auteur du vol.
3o La seconde copie, celle qui fut envoyée au roi Joseph, placée au milieu de hardes et effets, dans une des dix caisses où M. de Presle avait caché les papiers du roi, subit le sort suivant:
Les dix caisses furent envoyées d'abord de l'hôtel Joseph, les unes chez le nommé Legendre, valet de chambre dévoué, alors à Villiers-sur-Marne; d'autres, chez M. Madaud, buraliste de loterie, rue Saint-André-des-Arts, et beau-frère de M. Bouchard, un des secrétaires du roi Joseph; d'autres encore chez différentes personnes, parmi lesquelles la comtesse de Magnitaut. Les dépositaires de ces papiers ne tardèrent pas, craignant de se compromettre, à demander qu'on les leur retirât; on les fît porter à l'hôtel de la reine de Suède, rue d'Anjou-Saint-Honoré, 28. C'est de là que M. de Presle les expédia à Joseph, en Amérique.
Les caisses des papiers du roi, parmi lesquelles se trouvait celle renfermant la copie des lettres des souverains, ont donc été transportées de l'hôtel Joseph chez divers, de chez ces diverses personnes à l'hôtel de la reine de Suède. C'est évidemment dans l'un de ces deux transbordements que ces copies précieuses pour l'histoire auront été soustraites.
On avait perdu en quelque sorte le souvenir de cette affaire qui avait fait un certain bruit dans le principe, lorsqu'en 1855, un des principaux libraires-éditeurs de Paris proposa à un auteur qui s'occupait de l'histoire du premier Empire de demander au gouvernement de Napoléon III d'acquérir, moyennant une somme assez forte, la copie authentique de 150 lettres écrites par des souverains à Napoléon Ier.
L'éditeur dit à la personne qu'il avait choisie comme intermédiaire dans cette affaire qu'il ne connaissait pas le possesseur de ces lettres, qu'on en voulait 500,000 francs, qu'elles étaient cachées en France. La personne à qui l'éditeur s'adressa, craignant qu'on crût qu'elle avait un intérêt dans cette spéculation, ne voulut faire aucune démarche.
Toutefois on peut conclure de ce qui précède:
1o Que les originaux ont été vendus et probablement détruits par les intéressés.
2o Que des deux copies volées, l'une existe encore.
Après avoir reçu la lettre par laquelle O'Méara lui faisait connaître le désir de l'Empereur qu'on publiât les lettres des souverains, le roi Joseph répondit au docteur:
Philadelphie, le 1er