Les Rois Frères de Napoléon Ier. Albert Du Casse

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Название Les Rois Frères de Napoléon Ier
Автор произведения Albert Du Casse
Жанр Документальная литература
Серия
Издательство Документальная литература
Год выпуска 0
isbn 4064066082673



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ordres du roi, d'autoriser le Ministre de Sa Majesté à Washington à comprendre M. et Mme Charles de Canino sur le passeport de M. le comte de Survilliers, qui pourra débarquer à Anvers ou à Ostende.

      Le baron de Damas saisit avec empressement cette occasion de faire agréer à M. le comte Belliard les assurances de sa haute considération.

       En apprenant en Amérique que le gouvernement des Bourbons ne mettait pas d'obstacle à son retour en Europe, Joseph écrivit le 29 septembre 1826 à Madame de Villeneuve[52]:

      Ma chère belle-sœur,

      Je reçois votre lettre du 5 août; je n'ai jamais eu l'intention d'aller à Bruxelles; si l'on m'avait accordé de bonne grâce le séjour de la Toscane, j'aurais été volontiers y faire une visite à ma mère, avec l'espoir de ramener ma femme en Amérique où je suis trop bien pour ne pas désirer d'en faire partager le séjour à Julie.

      Je suis toujours bien reconnaissant, ma chère belle-sœur, des preuves sans cesse renaissantes de votre tendre amitié; Désirée et son mari sont aussi très excellents pour moi; les bons consolent ainsi des indifférents.

      Pendant son exil en Amérique, le roi Joseph avait pris l'habitude de mettre en note, dans une sorte de journal quotidien, tout ce qui se passait autour de lui, et lui était personnel. Nous trouvons dans ce journal quelques mots relatifs à un homme, M. de Persigny, qui, ministre et créé duc par Napoléon III, a marqué sous le second Empire. Voici les notes de Joseph, que M. Fialin de Persigny était venu trouver à Londres, en avril 1835, pour le déterminer à entrer dans une sorte de complot bonapartiste:

      M. le vicomte de Persigny, rue d'Artois, no 48, à Paris, et à Londres à Grillion, hôtel Albermale Street, arrive avec un billet de M. Presle à M. Maillard; il est l'auteur du no 1 de l'Occident français, il est âgé de 26 ans et paraît plus jeune encore; il montra un excessif enthousiasme pour la mémoire de l'Empereur et même pour le nom de sa famille, dans l'entretien d'une demi-heure que j'ai eu avec lui avant le dîner. Je me retirai de bonne heure; il causa jusqu'à deux heures du matin avec MM. Sari, Thibaud, etc.

      5 Avril dimanche. Je descends à déjeuner, j'ai un long entretien avec M. de Persigny, il paraît plein d'ardeur, il est partisan le plus absolu du caractère et des desseins de l'Empereur, il a pleuré comme un enfant en voyant son écriture; il s'exprime facilement et avec talent, cependant il ne m'est adressé par personne que je connaisse, il se dit de Roanne sur la Loire, sa famille tient aux Bourbons dont il a entièrement abandonné la cause.

      6 Avril. Je vais à Londres, j'y mène M. de Persigny, je descends avec Maillard chez le docteur O'Méara.

       19 Avril, jour de Pâques. M. le vicomte de Persigny me parle encore de ses projets, je lui en fais sentir l'inopportunité actuelle; il me remet un écrit que je ne lis qu'à ma rentrée dans ma chambre. Je promène avec lui, Sari et Maillard.

      20. Je fais prendre copie de l'écrit sans signature, je rends l'original à M. de Persigny en lui répétant les mêmes choses, je conviens de l'avantage national du but, mais je ne partage pas ses opinions sur l'efficacité des moyens, ainsi je l'engage à ne pas se compromettre sans espérance raisonnable; ses projets ne m'en présentent aucune.

      28. M. le vicomte de Persigny est à la maison, je refuse de recevoir l'ami qui lui est arrivé de Paris, je lui déclare que je n'entends pas me prêter à l'exécution de ses projets, à laquelle je répugne invinciblement; tout pour le devoir, rien pour mon ambition, je n'en ai pas d'autre que celle de contribuer au bonheur de la France, si elle m'offre une chance de la servir, mais jamais rien par une minorité factieuse; il dîne et couche à la maison.

      29. M. de Persigny part après déjeuner, je lui répète longuement les mêmes choses.

      Joseph était encore à Londres, en 1833, lorsque son neveu Louis-Napoléon, le futur empereur Napoléon III, lui envoya un petit ouvrage qu'il venait de faire paraître; l'ex-roi lui écrivit à ce sujet, le 20 septembre:

      Mon cher neveu, j'ai reçu avec ta lettre tes Considérations sur la Suisse. Je les ai lues avec un double intérêt. Je regrette que tu ne puisses pas honorablement employer tes talents et ton application à l'étude, au service de la patrie. Charlotte est beaucoup mieux depuis notre séjour à la campagne. Je me trouve par accident en ville aujourd'hui.

      Je te prie de me rappeler au bon souvenir de ta maman et de me croire bien tendrement

      Ton affectionné oncle,

       Joseph.

      Enfin, dans les premiers mois de 1841, Joseph put quitter Londres pour habiter la Toscane. Il écrivit à ce sujet au général duc de Padoue, son cousin, le 8 mars:

      Mon cher Cousin,

      Je vous confirme ma lettre du 3 de ce mois. Je pense que vous avez vu la duchesse de Crès, à laquelle j'écris aussi dans le même sens. Le jeune Maillard vous dira de ma part que ma demande se borne à ce que l'on ne mette pas d'obstacle à mon séjour en Toscane ou en Sardaigne et qu'on légalise le passeport autrichien que vous avez obtenu pour moi l'année passée, avec lequel je pourrai me rendre en Italie par le Rhin et la Suisse.

      Renvoyez-moi donc Adolphe[53] avec le passeport en règle aussitôt que vous le pourrez, il vous donnera des nouvelles plus en détail.

      Agréez ma vieille et constante amitié.

      Votre affectionné cousin.

      M. Guizot, alors ministre des affaires étrangères, auquel la nièce du roi Joseph par sa femme, la maréchale Suchet, duchesse d'Albuféra, s'était adressée pour que le roi Louis-Philippe fût sollicité afin de permettre au comte de Survilliers (Joseph) de se rendre en Italie, écrivit le 9 avril 1841:

      Madame la Maréchale,

      Le Roi ne fait pas la moindre objection à ce que M. le comte de Survilliers vienne vivre à Gênes ou à Florence; vous en êtes probablement déjà informée, mais je me donne le plaisir de vous le dire moi-même.

      À cette lettre était jointe la note ci-dessous:

      Note:

      Le gouvernement non-seulement donne son adhésion à ce que M. le comte de Survilliers vienne s'établir à Gênes, mais encore il exprime le désir que toute facilité lui soit donnée dans cette circonstance. C'est dans ce sens qu'il a répondu à M. l'ambassadeur de Sardaigne et qu'il a expédié, il y a trois jours, ses instructions à son propre ambassadeur près de Sa Majesté sarde.

      En octobre dernier, le gouvernement français a fait exprimer au gouvernement du grand-duc de Toscane les mêmes dispositions de sa part à l'égard du comte de Survilliers, qui demandait à résider à Florence; ces dispositions, il les maintient et les renouvellera même au besoin si le gouvernement toscan l'exigeait. Il est vrai que le gouvernement napolitain, s'appuyant sur des dispositions des traités de 1815, prétend que lorsqu'il s'agit de la famille Bonaparte, il faut le concours simultané des quatre puissances; qu'aucune d'elles ne peut agir isolément; mais la France se regarde, depuis 1830, affranchie de l'obligation de cet accord commun; elle croit pouvoir agir seule, librement et comme il lui plaît, et elle l'a constamment fait depuis cette époque.

       On croit que M. le comte de Survilliers, établi à Gênes, pourra facilement négocier pour venir ensuite à Florence; que l'Autriche prêtera aisément son intervention pour aplanir les difficultés que Naples oppose encore.

      Nous terminons ici ce qui a trait au frère aîné de l'Empereur, dont la vie politique avait cessé depuis 1816. L'ex-roi mourut à Florence, en 1843, après avoir fait hommage à la France, pour être placés sur le tombeau de Napoléon Ier, des insignes et des armes du grand homme qui lui étaient échus en partage. Il avait nommé pour un de ses exécuteurs testamentaires M. Maillard (Louis) qui méritait toute sa confiance et qui ne l'avait pas quitté depuis 1808.

      Le roi Joseph avait 76 ans lorsqu'il s'éteignit, entouré de sa famille et de quelques serviteurs fidèles et dévoués.

      Deux