Название | Contes Français |
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Автор произведения | Divers Auteurs |
Жанр | Языкознание |
Серия | |
Издательство | Языкознание |
Год выпуска | 0 |
isbn | 4064066089320 |
[25] vous trouvent ici, ils vont brûler la maison. Descendez
dans la cave bien vite, et faites pas de bruit. Si vous faites
du bruit, nous sommes perdus.
Le sous-officier, effaré, murmura:
--Che feux pien, che feux pien. Par où faut-il
[30] tescendre?
La jeune femme souleva avec précipitation la trappe
étroite et carrée, et les six hommes disparurent par le petit
escalier tournant, s'enfonçant dans le sol l'un après l'autre,
à reculons, pour bien tâter les marches du pied.
Mais quand la pointe du dernier casque eut disparu,
[5] Berthine rabattant la lourde planche de chêne, épaisse
comme un mur, dure comme de l'acier, maintenue par des
charnières et une serrure de cachôt, donna deux longs
tours de clef, puis elle se mit à rire, d'un rire muet et ravi,
avec une envie folle de danser sur la tête de ses prisonniers.
[10] Ils ne faisaient aucun bruit, enfermés là-dedans comme
dans une boite solide, une boite de pierre, ne recevant
que l'air d'un soupirail garni de barres de fer.
~-Berthine aussitôt ralluma son feu, remit dessus sa
marmite, et refit de la soupe en murmurant:
[15]--Le père s'ra fatigué cette nuit.
Puis elle s'assit et attendit. Seul, le balancier sonore
de l'horloge promenait dans le silence son tic-tac régulier.
De temps en temps la jeune femme jetait un regard sur
le cadran, un regard impatient qui semblait dire:
[20]--Ça ne va pas vite.
Mais bientôt il lui sembla qu'on murmurait sous ses
pieds. Des paroles basses, confuses, lui parvenaient à
travers la voûte maçonnée de la cave. Les Prussiens
commençaient à deviner sa ruse, et bientôt le sous-officier
[25] remonta le petit escalier et vint heurter du poing la
trappe. Il cria de nouveau:
--Oufrez.
Elle se leva, s'approcha et, imitant son accent:
--Qu'est-ce que fous foulez?
[30]--Oufrez.
--Che n'oufre pas.
L'homme se fâchait.
--Oufrez ou che gasse la borte.
Elle se mit à rire:
--Casse, mon bonhomme, casse, mon bonhomme!
Et il commença à frapper avec la crosse de son fusil
[5] contre la trappe de chêne, fermée sur sa tête. Mais elle
aurait résisté à des coups de catapulte.
La forestière l'entendit redescendre. Puis les soldats
vinrent, l'un après l'autre, essayer leur force, et inspecter
la fermeture. Mais, jugeant sans doute leurs tentatives
[10] inutiles, ils redescendirent tous dans la cave et
recommencèrent à parler entre eux.
La jeune femme les écoutait, puis elle alla ouvrir la
porte du dehors et elle tendit l'oreille dans la nuit.
Un aboiement lointain lui parvint. Elle se mit à siffler
[15] comme aurait fait un chasseur, et, presque aussitôt, deux
énormes chiens surgirent dans l'ombre et bondirent sur elle
en gambadant. Elle les saisit par le cou et les maintint
pour les empêcher de courir. Puis elle cria de toute sa force:
--Ohé père!
[20] Une voix répondit, très éloignée encore:
~-Ohé Berthine!
Elle attendit quelques secondes, puis reprit:
--Ohé père!
La voix plus proche répéta:
[25]--Ohé Berthine!
La forestière reprit:
--Passe pas devant le soupirail. Y a des Prussiens
dans la cave.
Et brusquement la grande silhouette de l'homme se
[30] dessina sur la gauche, arrêtée entre deux troncs d'arbres.
Il demanda, inquiet:
--Des Prussiens dans la cave. Qué qui font?
La jeune femme se mit à rire:
--C'est ceux d'hier. Ils s'étaient perdus dans la forêt,
je les ai mis au frais dans la cave.
Et elle conta l'aventure, comment elle les avait effrayés
[5] avec des coups de revolver et enfermés dans le caveau.
Le vieux toujours grave demanda:
--Qué que tu veux que j'en fassions à c't'heure?
Elle répondit:
--Va quérir M. Lavigne avec sa troupe. Il les fera
[10] prisonniers. C'est lui qui sera content.
Et le père Pichon sourit:
--C'est vrai qu'i sera content.
Sa fille reprit:
~-T'as de la soupe, mange-la vite et pi repars.
[15] Le vieux garde s'attabla, et se mit à manger la soupe
après avoir posé par terre deux assiettes pleines pour ses
chiens.
Les Prussiens, entendant parler, s'étaient tus.
L'Échasse repartit un quart d'heure plus tard. Et
[20] Berthine, la tête dans ses mains, attendit.
Les prisonniers recommençaient à s'agiter. Ils criaient
maintenant, appelaient, battaient sans cesse de coups de
crosse furieux la trappe inébranlable.
Puis ils se mirent à tirer des coups de fusil par le soupirail,
[25] espérant sans doute être entendus si quelque détachement
allemand passait dans les environs.
La forestière ne remuait plus; mais tout ce bruit l'énervait,
l'irritait. Une colère méchante s'éveillait en elle;
elle eût voulu les assassiner, les gueux, pour les faire taire.
[30] Puis son impatience grandissant,