Название | Le magasin d'antiquités, Tome II |
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Автор произведения | Чарльз Диккенс |
Жанр | Зарубежная классика |
Серия | |
Издательство | Зарубежная классика |
Год выпуска | 0 |
isbn |
«M'y voici donc! pensa Kit, se glissant vers le banc vide le plus rapproché en face de celui de sa mère, de l'autre côté de la petite nef; mais comment faire pour arriver jusqu'à elle ou pour la déterminer à sortir? Autant vaudrait être à vingt milles d'ici. Jamais elle ne s'éveillera que tout ne soit fini, et l'heure marche pendant ce temps! Si cet homme pouvait seulement s'arrêter une minute, ou bien s'ils se mettaient tous à chanter!»
Malheureusement, il n'y avait guère lieu d'espérer l'une ou l'autre chose avant deux heures. Le prédicant venait d'annoncer à ses auditeurs qu'il se proposait de ne pas finir avant de les avoir convaincus, et il était clair que s'il tenait à réaliser seulement la moitié de sa promesse, deux heures ne seraient pas de trop pour une telle entreprise.
Dans son agitation et son désespoir, Kit promenait ses regards tout autour de la chapelle; les ayant laissés tomber sur un petit siège placé devant la chaire, il eut peine à en croire le témoignage de ses yeux qui lui faisaient voir… Quilp!
Il eut beau se les frotter deux ou trois fois, toujours ils s'obstinaient à lui persuader que Quilp était là. Oui, c'était bien lui assis, les mains appuyées sur ses genoux et son chapeau posé entre ses jambes, sur un petit escabeau; c'était lui, avec cette grimace habituelle imprimée sur sa laide figure; son regard était attaché au plafond. Assurément, il n'avait pris garde ni à Kit ni à sa mère, et il ne paraissait pas le moins du monde se douter de leur présence; cependant, Kit ne put s'empêcher de penser que l'attention du méchant nain était fixée sur eux, et sur eux seulement.
Sous le coup de la stupéfaction qu'il avait éprouvée à cette vue et de la crainte que ce ne fût le signe avant-coureur de quelque échec, de quelque chagrin, il comprit toutefois la nécessité de ne pas bayer aux corneilles et de prendre des mesures énergiques pour emmener sa mère; car l'ombre du soir descendait et la situation devenait grave. En conséquence, dès que le petit Jacob s'éveilla, Kit s'arrangea de manière à attirer son attention mobile, et cela ne fut pas difficile, un éternuement suffit; Kit alors lui fit signe d'éveiller leur mère.
Le malheur voulut que précisément en ce moment même le prédicant, dans le développement impétueux d'un des points de son sermon, s'avança tellement par-dessus le bord de sa chaire, que ses jambes seules restèrent au dedans; tandis qu'appuyé sur sa main gauche il faisait de la droite des gestes véhéments, il regarda fixement ou du moins parut regarder le petit Jacob dans les yeux, le menaçant de l'oeil et du geste (l'enfant du moins le crut) de tomber sur lui, littéralement et non au figuré, s'il osait remuer seulement un muscle de sa face. Au milieu de cet effrayant état de choses, distrait par l'apparition soudaine de Kit, et fasciné par les yeux flamboyants du prédicant, le malheureux Jacob était doublement tenu en arrêt, entièrement hors d'état de remuer, fort disposé à pleurer, s'il l'avait osé, et répondant au regard de son pasteur par un regard si flamboyant, que ses yeux écarquillés semblaient près de sortir de leurs orbites.
«Ma foi! s'il faut agir ouvertement, pensa Kit, eh bien! en avant!»
Il sortit donc tout doucement de son banc et se glissa jusqu'à celui de sa mère; et comme M. Swiveller n'eût pas manqué de le dire, s'il eût été là, il «prit au collet» le poupon sans prononcer une seule parole.
– Chut! ma mère! murmura-t-il ensuite. Sortez avec moi; j'ai quelque chose à vous communiquer.
– Où suis-je? dit mistress Nubbles.
– Dans ce bienheureux Petit-Béthel, répondit son fils avec une certaine amertume.
– Bienheureux, en effet, s'écria mistress Nubbles saisissant le mot. Oh! Christophe, combien j'ai été édifiée ce soir!
– Oui, oui, je le sais, dit vivement Kit; mais venez, ma mère, tout le monde nous regarde. Ne faites pas de bruit, emmenez Jacob, c'est bien.
– Arrête, satan, arrête! cria de nouveau le prédicant. Ne tente point la femme qui te prête l'oreille, mais écoute la voix de celui qui te parle. Il emporte un agneau du troupeau, ajouta-t-il, en élevant de plus en plus sa voix perçante, et désignant le poupon, il emporte un agneau, un précieux agneau! Il rôde ici comme un loup aux heures de la nuit pour enlever les tendres agneaux!»
Kit était bien le garçon le plus modéré qu'il y eût au monde; mais ce langage violent, ainsi que les circonstances critiques où il se trouvait, le mirent hors de lui; il fit face à la chaire avec le poupon dans les bras et répondit à haute voix:
«Pas du tout: c'est mon frère.
– C'est le mien, c'est mon frère à moi! cria le prédicant.
– Ce n'est pas vrai! répliqua Kit avec indignation. Pouvez-vous bien dire chose pareille?.. Et surtout pas de sottises, s'il vous plaît. Quel mal ai-je fait? Je ne serais certainement pas venu ici pour les emmener si je n'y avais été forcé, vous pouvez en être sûr; je voulais le faire sans bruit, mais vous, vous en voulez. Maintenant ayez la bonté de garder vos injures pour Satan et compagnie si cela vous convient, monsieur, mais laissez-moi tranquille, s'il vous plaît.»
En même temps, Kit sortit de la chapelle, suivi de sa mère et du petit Jacob, et se trouva en plein air avec un vague souvenir d'avoir vu l'auditoire s'éveiller et le regarder tout surpris; il se rappelait également que Quilp, durant cette scène d'interruption, avait gardé la même attitude sans détacher ses yeux du plafond ni paraître prendre le moindre intérêt à ce qui se passait.
«O Kit! dit la mère en portant son mouchoir à ses yeux, qu'avez- vous fait! Jamais je ne pourrai plus revenir ici, jamais!
– J'en suis enchanté, ma mère. Vous aviez donc bien du repentir de la petite part de plaisir que vous avez prise la nuit dernière, que vous avez cru devoir en faire pénitence ce soir? Voilà pourtant comme vous faites toujours! s'il vous arrive d'avoir un moment de bonheur ou de gaieté, vous venez ici, devant cet homme- là, dire que vous en êtes bien fâchée. Vraiment, ma mère, si vous n'étiez pas ma mère, je vous en ferais honte.
– Silence! mon cher enfant, s'écria mistress Nubbles, je sais bien que vous ne pensez pas ce que vous dites; mais c'est égal, vous parlez là comme un pécheur.
– Je ne pense pas ce que je dis! repartit Kit. Certainement que je le pense! Je ne puis croire, ma mère, que l'innocente gaieté et que la bonne humeur soient considérées dans le ciel comme de plus grands péchés que des cols de chemise, et ces gens-là ne montrent ni raison ni bon sens en voulant supprimer les derniers, ou en interdisant le reste; certainement si, je le pense. Mais, je n'ajouterai pas un mot de plus sur ce sujet, si vous me promettez de ne plus pleurer; ce sera tout. Prenez le poupon, qui est plus léger, et donnez-moi le petit Jacob. Tout en marchant, et tâchons que ce soit le plus vite possible, je vous communiquerai les nouvelles que j'apporte et qui vous surprendront un peu, je vous en avertis. Là, c'est bien. Maintenant, vous voilà comme si vous n'aviez vu de toute votre vie le Petit-Béthel, et j'espère bien que vous ne le reverrez plus. Voilà aussi le poupon, très-bien. Petit Jacob, montez sur mon dos à califourchon et tenez mon cou bien serré; et si par hasard le ministre du Petit-Béthel vous appelle un précieux agneau, vous ou votre frère, vous pourrez bien dire que c'est la plus grande vérité qui lui soit sortie de la bouche depuis un an, et que s'il voulait bien ne pas assaisonner son agneau à la sauce au poivre, il n'en vaudrait que mieux, pour être moins piquant et moins aigre. Jacob, vous pouvez lui dire ça de ma part.»
C'est ainsi que moitié gaiement, moitié sérieusement, déterminé à se montrer de bonne humeur, pour en donner aussi à sa mère et aux enfants, Kit les mena d'un bon pas. Chemin faisant, il raconta ce qui s'était passé chez le notaire, et exposa le but pour lequel il était venu se jeter au travers des solennités du Petit-Béthel.
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