Un diplomate luxembourgeois hors pair. Paul Schmit

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Название Un diplomate luxembourgeois hors pair
Автор произведения Paul Schmit
Жанр Биографии и Мемуары
Серия
Издательство Биографии и Мемуары
Год выпуска 0
isbn 9782919792009



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Le Gallais demanda à l’éditeur de bien le noter dans son curriculum vitae dans l’« International year book » publié à Londres.

      Chacun devant être juge dans certaines circonstances, l’ambassadeur devait être comblé en passant en revue, à la fin de sa vie, tous les moments historiques auxquels il avait assisté ou auxquels il avait pu participer. Se sentant à son aise en compagnie des grands de ce monde, Hugues Le Gallais sachant recevoir avec une grâce parfaite, avait tout pour devenir diplomate. Homme aux belles manières d’antan et aux allures cérémonieuses, Hugues Le Gallais essayait toujours de comprendre, d’interpréter et de transmettre. Il avait tout pour exercer le métier de diplomate et attendait patiemment à Luxembourg, de février 1937 à début 1940, le bon moment pour repartir vers d’autres contrées. Il était désormais en possession d’une collection d’art acquise au Japon.

      80 Als, Georges : Robert Als (1897-1991) au service de son pays : à la recherche du temps perdu. Luxembourg, Rapid Press, 2003.

      81 Guill Konsbruck (1909-1983), aide de camp du prince Félix, commissaire au Ravitaillement et aux Affaires économiques. Du 23 février 1945 au 29 août 1946, il fut membre du gouvernement, avant d’être, à partir du 15 octobre 1946, nommé directeur de l’administration centrale d’Arbed. Il devint en 1947 directeur général adjoint d’Arbed et en 1959 directeur général d’Arbed Participations.

      82 Alfred Loesch (1902-1982), avocat, Grand maréchal de la Cour de 1947 à 1964.

      83 Voir plus loin sous Seconde Guerre mondiale.

      84 AMgdL 1697 ; correspondance officielle Le Gallais à S.A.R. ; notes sur entretiens officiels à Washington ; 1ère catégorie ; lettre du 12 février 1943 de HLG à la Grande-Duchesse.

      85 Voir plus loin sous Seconde Guerre mondiale.

      86 AMgdL 1697 ; correspondance officielle Le Gallais à S.A.R. ; notes sur entretiens officiels à Washington ; 1ère catégorie ; quatre lettres manuscrites de HLG à la Grande-Duchesse : 22 décembre 1942, avant la visite en Californie et au Missouri ; 12 décembre 1942, suite à invitation à se rendre en visite en Louisiane ; 28 novembre 1942, au sujet de la représentation militaire et du rejet de voir Konsbruck désigné en tant qu’attaché militaire auprès de la légation ; 8 octobre 1942, avant la rencontre avec le président et sur la formation du Grand-Duc héritier.

      87 Comme ces témoignages n’ont guère d’impact sur le déroulement des années passées aux Etats-Unis, ils ne sont pas insérés dans la description des années 1940. Le Gallais jouait sur plusieurs tableaux, et son lien ancien et singulier avec le chef d’Etat n’allait pas se démentir et allait largement au-delà d’une fonction honorifique.

      88 Albert Wehrer (1895-1967), chargé d’affaires à Berlin de juin 1938 jusqu’en 1940 et après la guerre jusqu’en 1950. Avant le 10 mai 1940, il avait été conseiller de gouvernement, puis secrétaire général du gouvernement, et à partir de mai et jusqu’en octobre 1940 président de la « Landesverwaltungskommission ». Il est devenu en 1945 chef de la mission luxembourgeoise auprès du Conseil de contrôle allié à Berlin. Il devint en 1950 ministre à Berlin, puis, à partir d’octobre 1951, ministre plénipotentiaire à Paris, avant d’être nommé, en avril 1952, membre de la Haute Autorité de la Ceca.

      COLLECTIONNEUR D’ART ORIENTAL

      Du temps de son affectation au Japon au service de Columeta, Hugues Le Gallais avait acquis et rapporté de nombreuses pièces d’art oriental qu’il avait su reconnaître comme objets de valeur sur la base de son initiation chez l’expert Petrucci. Il se définissait lui-même comme collectionneur d’objets d’art de l’Extrême-Orient. Sa collection personnelle emmenée et exposée à l’ambassade à Washington comprenait des épées, des paravents et des kimonos japonais. L’ambiance dans cette maison sombre et à la splendeur fastueuse devenait plus personnelle, mais aussi plus exotique avec la surabondance d’œuvres rappelant l’Orient. Malgré son statut de diplomate, son ouverture d’esprit permettait à Hugues Le Gallais, passé maître dans l’art de recevoir, de fréquenter des collectionneurs et des gens sophistiqués et intéressés comme lui par l’art. Toujours à la recherche du plus beau qui ne sature pas, dénichant des merveilles et les mettant en valeur là où on ne les attendait pas, Hugues Le Gallais a été ébloui par les œuvres japonaises toute sa vie durant. Il est aussi l’auteur d’articles sur l’art d’Extrême-Orient parus dans la Gazette des Beaux-Arts dans les années 1933, 1947, 1948 et 1949.

      L’année du départ de Washington est aussi celle de la séparation avec une partie de sa collection. Peut-être que les Le Gallais voyaient les choses venir ou souhaitaient tout simplement faire du « downsizing ». Toujours est-il que, le 20 novembre 1958, Hugues Le Gallais a écrit à sa fidèle ex-secrétaire Maloney qu’une vente d’objets n’a pas eu le résultat escompté et qu’il compte se rendre sous peu dans la capitale britannique. La vente de 178 pièces chez Sotheby’s à Londres l’obligeait à prouver qu’une soucoupe Ming montrant des poissons avec bord ondulé (« Ming saucer fish with wavy rim ») a appartenu à sa collection avant 1951 afin que les communistes chinois ne se montrent pas intéressés outre-mesure par cet objet et en demandent la restitution. En soldat fidèle, Madame Maloney a certifié par une lettre à l’acquéreur que l’objet et la collection se trouvaient à l’ambassade de 1940 à 1958 et avaient été acquis par l’ambassadeur avant son départ d’Orient en 1935. Dans un autre papier, Hugues Le Gallais a demandé que, pour les objets de sa collection, il y a lieu de mentionner qu’ils ont plus de 100 ans et que pour ceux datant du XIXe siècle, il y a lieu de préciser : « début du XIXe ». Le 17 août 1958, alors qu’il était à Venise, Le Gallais a demandé à Madame Maloney d’écrire à Sotheby’s qu’il maintenait son appréciation quant à la qualité et la valeur de certaines pièces au sujet desquelles la maison de vente aux enchères s’est montrée déçue. Il s’agit du tableau « Le philosophe » et encore d’un rouleau tibétain (« Tibetan scroll, one of the strongest seen by Laurence Bingon »). La vente d’une partie de la collection d’Hugues et du Palazzo San Maurizio, que Pisana possédait avec sa sœur, permit l’acquisition d’un palais à côté du Ca’ Rezzonico, le Palazzo Contarini Michiel, où les Le Gallais allaient demeurer jusqu’à la fin de leurs jours. En fait, l’ambassadeur s’était défait non seulement chez Sotheby’s d’une partie de sa collection, mais avait aussi vendu à la « Freer Gallery of Art », le musée d’art asiatique et proche-oriental fondé en 1923 à Washington et situé sur le « National Mall », deux lions qui avaient initialement trouvé une place de part et d’autre de la cheminée dans le hall d’entrée de l’ambassade. Quelle passion donc pour une collection sur laquelle nous allons revenir ! Tout cela devait aussi permettre, un jour, de recevoir de manière plus que digne et distinguée ses nombreux amis à Venise.

      Revenons maintenant à cette période si tendue et complexe d’avant la guerre. Le Grand-Duché se sentait menacé par son voisin allemand, mais continuait d’observer sa neutralité « perpétuelle et désarmée », lui imposée par le traité de Londres du 11 mai 1867 et violée une première fois en 1914 par l’invasion allemande. 1937, l’année de l’installation au Luxembourg de Pisana et d’Hugues, avait été celle du rejet, en juin, de la loi dite « muselière ». Ce projet de loi menaçant les libertés publiques et tendant en fait à interdire le Parti communiste fut rejeté lors d’un référendum par la majorité du corps électoral. C’était un désaveu cinglant pour le ministre d’Etat chrétien-social de l’époque, Joseph Bech,89 qui dut céder ce poste à Pierre Dupong,90 la figure de proue de l’aile gauche de son parti. Bech, qui était proche de la Grande-Duchesse et pour lequel Le Gallais allait développer une admiration certaine, gardera néanmoins le portefeuille des Affaires étrangères jusqu’en 1959. D’aucuns ont vu en lui un Talleyrand luxembourgeois, Le Gallais ayant développé une certaine admiration pour l’un et pour l’autre. Nous ignorons dans quelle mesure Le Gallais fréquentait ces acteurs décisifs de sa vie des prochaines décennies au cours de son séjour de trois ans à