Название | Ivanhoe. 4. Le retour du croisé |
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Автор произведения | Вальтер Скотт |
Жанр | Зарубежная классика |
Серия | |
Издательство | Зарубежная классика |
Год выпуска | 0 |
isbn |
«AYMER.Prieur de Sainte-Marie-de-Jorvaulx.»
«Postscriptum. Certes, ta chaîne d'or n'est pas restée long-temps en ma possession. Elle servira maintenant à suspendre au cou d'un braconnier proscrit le sifflet avec lequel il appelle ses chiens, autrement dits ses camarades.»
«Eh bien! Conrad, dit le grand-maître, que dis-tu de cette lettre? Une caverne de voleurs! c'est un lieu très convenable pour la résidence d'un pareil prieur. Il ne faut pas s'étonner si la main de Dieu s'appesantit sur nous, et si dans la Terre-Sainte nous perdons place après place, et sommes repoussés pied à pied par les infidèles, lorsque nous aurons des hommes d'église comme cet Aymer. Mais apprends-moi ce qu'il entend par cette seconde sorcière d'Endor?» dit-il à demi voix à son confident.
Conrad connaissait mieux, peut-être par pratique, le jargon de la galanterie que son supérieur; et il lui expliqua le passage de la lettre qui l'embarrassait, en lui disant que c'était une sorte de langage usité parmi les hommes du monde, à l'égard des femmes qu'ils aimaient par amourette. Mais cette explication ne satisfit pas le bigot Beaumanoir. «Conrad, dit-il, il y a dans ce langage plus que tu ne te l'imagines; la simplicité de ton coeur ne saurait sonder la profondeur de cet abîme d'iniquité. Cette Rébecca d'York est une élève de cette Miriam dont tu as entendu parler. Tu vas entendre le juif; il ne tardera pas à en convenir en notre présence.» Puis se tournant vers Isaac, il lui dit à haute voix: «Ta fille est donc prisonnière de Bois-Guilbert?»
«Oui, révérend et valeureux seigneur, répondit Isaac, et tout ce qu'un pauvre homme peut payer pour sa rançon…» – «Silence, interrompit le grand-maître. Ta fille a exercé l'art de guérir; n'est-il pas vrai?» – «Oui, mon gracieux seigneur, répondit Isaac, et chevaliers, et paysans, seigneurs et vassaux, tous peuvent bénir le ciel pour le don merveilleux qu'il a daigné lui accorder. Plus d'un malade et homme souffrant peut attester qu'il a été guéri par le moyen de son art, tandis que tout autre secours humain avait été inutilement employé; mais la bénédiction du Dieu de Jacob était sur elle.»
Beaumanoir se tourna vers Mont-Fichet, et lui dit avec un sourire hideux: «Tu vois, Conrad, les embûches de l'ennemi dévorant. Tel est l'appât avec lequel il s'empare des ames, donnant un pauvre espace de vie sur la terre, en échange d'un bonheur éternel dans l'autre monde. Notre bienheureuse règle a bien raison de dire: «Semper percutiatur leo vorans!» À bas le lion! à bas le destructeur! ajouta-t-il en élevant et brandissant son mystique abacus, comme pour défier les puissances de ténèbres.» Puis adressant la parole au juif: «Ta fille sans doute opère ses cures au moyen de caractères, de talismans, de paroles, de périaptes et autres mystères cabalistiques?» – «Non, révérend et brave chevalier, répondit Isaac; mais c'est principalement à l'aide d'un baume d'une vertu merveilleuse.» – «D'où a-t-elle eu ce secret? demanda Beaumanoir.» – «Il lui a été donné, répondit Isaac avec une sorte de répugnance, par Miriam, une sage matrone de notre tribu.» – «Par Miriam, détestable juif! s'écria Beaumanoir en faisant un signe de croix; par Miriam, cette abominable sorcière, dont les enchantemens sont connus de toute la chrétienté? Son corps fut brûlé à un poteau, et ses cendres furent dispersées aux quatre vents; et puisse le ciel en arriver autant à moi et à mon ordre, si je ne traite pas ainsi sa pupille et encore plus sévèrement. Je lui apprendrai à jeter des sorts et des enchantemens sur les soldats du saint Temple. Damien, qu'on mette ce juif à la porte, et qu'on le mette à mort s'il résiste ou s'il se représente. Quant à sa fille, nous agirons envers elle comme nous y autorisent la loi chrétienne et notre éminente dignité.»
Le pauvre Isaac fut donc chassé sur-le-champ, sans qu'on voulût écouter ni ses prières, ni même ses offres. Il n'eut rien de mieux à faire que de retourner chez le rabbin et de tâcher d'apprendre par son moyen quel serait le sort de sa fille. Jusqu'alors il avait craint pour son honneur; maintenant il avait à trembler pour sa vie. Pendant ce temps-là, le grand-maître envoya ordre au précepteur de Templestowe de comparaître devant lui.
CHAPITRE XXXVI
«Ne dis point que mon art est une imposture. Tout le monde vit par la fausseté, le déguisement, la dissimulation. C'est avec le déguisement que le mendiant demande l'aumône, et que le léger courtisan obtient des terres, des titres, un rang et du pouvoir. Le clergé ne le dédaigne point, et le hardi soldat en fait usage pour améliorer son service, pour monter en grade. Tout le monde en convient, il convient à tout le monde: tout le monde l'emploie; et celui qui se contente de paraître ce qu'il est n'aura pas grand crédit à l'église, dans les camps et à la cour. Ainsi va le monde.»
Albert Malvoisin, président, ou, pour parler le langage de l'ordre, le précepteur de l'établissement de Templestowe, était frère de ce Philippe Malvoisin dont nous avons déjà eu occasion de parler dans cette histoire, et était, comme le baron, intimement lié avec Brian de Bois-Guilbert. Parmi les hommes dissolus et dénués de tout principe dont l'ordre du Temple ne comptait qu'un trop grand nombre, Albert de Templestowe pouvait réclamer une sorte de distinction. Il y avait néanmoins cette différence entre lui et Bois-Guilbert, qu'il savait couvrir ses vices et son ambition du voile de l'hypocrisie, et prendre le masque du fanatisme qu'il méprisait intérieurement. Si l'arrivée du grand-maître n'eût pas été aussi soudaine qu'elle était inattendue, il n'aurait rien vu à Templestowe qui pût indiquer le moindre relâchement dans la discipline; et, quoique surpris, et jusqu'à un certain point découvert, Albert Malvoisin écouta avec tant de marques de respect et de contrition les réprimandes de son supérieur, et mit tant d'empressement à réparer les fautes qu'il censurait, en un mot, réussit tellement bien à donner un air de dévotion ascétique à une congrégation qui avait été tout récemment plongée dans les plaisirs et la licence, que Lucas Beaumanoir commença à avoir une meilleure opinion des moeurs du précepteur, que les premières apparences de l'établissement ne l'avaient porté à en concevoir.
Mais ces sentimens favorables de la part du grand-maître furent fortement ébranlés quand il apprit qu'Albert avait admis dans l'établissement religieux une captive juive; et, comme il y avait lieu de le craindre, la maîtresse d'un chevalier de l'ordre. Aussi, lorsqu'Albert se présenta devant lui, il jeta sur le précepteur un regard plein de sévérité. «Il y a, dit-il, dans cette maison consacrée au saint ordre du Temple, une femme juive amenée par un de nos frères et par votre connivence, sire précepteur.»
Albert Malvoisin fut accablé de confusion; car l'infortunée Rébecca avait été enfermée dans une partie reculée et secrète du bâtiment, avec toutes les précautions convenables pour empêcher qu'on n'en fût instruit. Celui-ci lut dans les yeux de Beaumanoir la perte de Bois-Guilbert et la sienne, s'il ne parvenait à détourner l'orage qui les menaçait. «Pourquoi gardez-vous le silence?» demanda le grand-maître. – «M'est-il permis de parler?» dit le précepteur du ton de la plus profonde humilité, quoiqu'en faisant cette question il ne cherchât qu'à gagner un peu de temps pour mettre de l'ordre dans ses idées. – «Parle, nous te le permettons, dit le grand-maître; parle, et dis-nous si tu connais le chapitre de nos saints statuts, qui a pour titre: De commilitonibus Templi in sancta civitate, qui cum miserrimis mulieribus versantur, propter oblectationem carnis?»
«Assurément, très révérend père, répondit le précepteur; je ne suis pas parvenu à la haute dignité à laquelle j'ai été élevé sans connaître une des plus importantes prohibitions de notre sainte règle.» – «Comment se fait-il donc, dit le grand-maître, je te le demande de nouveau, que tu aies souffert qu'un de nos frères amenât sa maîtresse, et même une sorcière juive, dans notre