Название | La terre et la lune: forme extérieure et structure interne |
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Автор произведения | P. Puiseux |
Жанр | Языкознание |
Серия | |
Издательство | Языкознание |
Год выпуска | 0 |
isbn | 4064066075040 |
Note 2: (retour) Mairan, Recherches géométriques sur la diminution des degrés en allant de l'équateur vers les pôles. Paris, 1720.
Newton accordait, avec raison, peu de crédit aux chiffres de Cassini, comme aux raisonnements de Mairan. Dans la troisième édition de son Ouvrage, parue l'année qui précéda sa mort (1726), il maintient la position qu'il avait prise concernant la figure de la Terre. Mais, sous l'influence d'un amour-propre national mal placé, l'opinion publique en France se prononçait fortement pour Cassini. Celui-ci, d'ailleurs, annonçait de nouvelles vérifications. La mesure d'un arc de parallèle par Brest, Paris et Strasbourg, exécutée en collaboration avec Maraldi, de 1730 à 1734, lui semblait décisive. «Ces observations, disait le commissaire de l'Académie, se sont trouvées si favorables au sphéroïde allongé que M. Cassini a eu la modération de ne pas vouloir en tirer tout l'avantage qu'il eût pu à la rigueur et de s'en retrancher une partie.» En réalité, la démonstration est plus faible encore que celle qui se fonde sur l'arc de méridien.
Jean Bernoulli, qui s'était déjà trouvé en conflit avec Newton dans une controverse célèbre, concourait en 1734 pour un prix de l'Académie des Sciences de Paris. Pour cette double raison, il devait incliner vers l'opinion qui dominait en France. Aussi le voyons-nous s'écrier pour conclure: «Après cette heureuse conformité de notre théorie avec les observations célestes, peut-on plus longtemps refuser à la Terre la figure du sphéroïde oblong, fondée d'ailleurs sur la discussion des degrés de la méridienne, entreprise et exécutée par le même M. Cassini avec une exactitude inconcevable?» 3.
Note 3: (retour) Todhunter, A history of the mathematical theories of attraction and the figure of the earth, 1873.
A cela un disciple de Newton, Désaguliers, répondait qu'aucune loi d'attraction, aucune distribution de densité à l'intérieur ne pouvait se concilier avec l'ellipsoïde allongé. C'était aller trop loin. Clairaut montra depuis qu'avec un noyau solide d'une forme convenable l'ellipsoïde allongé pourrait être figure d'équilibre. D'autre part, l'Anglais Childrey estimait que la Terre devait être allongée parce qu'il tombe annuellement sur les pôles plus de neige que le Soleil n'en peut fondre. C'était méconnaître l'influence de la marche des glaciers et de la dérive des banquises.
La thèse de Newton trouvait d'ailleurs des partisans distingués, même en France. En 1720, un écrit anonyme parut sous le titre: Examen désintéressé des diverses opinions concernant la figure de la Terre. Sous couleur de rapporter impartialement les arguments pour et contre, il faisait bonne justice des prétentions de Cassini à une exactitude supérieure. L'auteur dissimulé de l'Ouvrage était Maupertuis, académicien et homme du monde, bien reçu chez les grands et en rivalité avec Cassini. En 1732, il publia, sous son nom cette fois, un Discours des différentes figures des astres. Il y commente et justifie avec intelligence les résultats de Newton. Il montre comment la mesure de deux arcs de méridien éloignés est nécessaire pour déduire des valeurs un peu sûres des demi-axes de l'ellipse.
Sous l'impression produite par le Livre de Maupertuis, l'Académie des Sciences résolut de procéder à une expérience décisive. Deux expéditions furent organisées. L'une devait se rendre au Pérou, l'autre en Laponie. En vue de la mesure des bases, on commanda au même artiste, Langlois, deux règles de fer aussi égales que possible, connues depuis sous les noms de toise du Pérou et de toise du Nord.
Maupertuis, désigné comme chef de l'expédition de Laponie, se mit en route en avril 1736. Il emmenait avec lui Clairaut, Camus, Lemonnier fils, l'abbé Outhier; Celsius, professeur d'Astronomie à Upsal, se joignit à eux. Deux relations nous sont parvenues, écrites, l'une par Maupertuis, l'autre par l'abbé Outhier. Elles se complètent utilement sur plus d'un point. Les triangulations et les visées astronomiques, contrariées par les marécages, les moustiques, la brume autour des sommets, la rigueur du climat, furent cependant menées à bien dans l'été et l'automne de 1736. On mesura une base de 7406 toises sur la glace d'un fleuve et l'on s'installa pour le reste de l'hiver dans le village de Tornea, enseveli sous la neige. Les calculs, mis au net, donnaient 57 422 toises au degré. La comparaison avec l'arc français portait l'aplatissement à 1/178, chiffre supérieur à celui que Newton avait prévu. En tout cas, aucun doute ne pouvait subsister sur sa réalité. «On tint la chose secrète, dit Maupertuis, tant pour se donner le loisir de la réflexion sur une chose peu attendue que pour avoir le plaisir d'en apporter à Paris la première nouvelle.»
Le départ eut lieu en juin 1737. Au moment de l'embarquement, un accident survint. Les instruments tombèrent à la mer et ne purent être repêchés que déjà endommagés par la rouille. On doit reconnaître aussi que toutes les vérifications désirables n'avaient pas été faites et leur omission donna lieu, de la part des amis de Cassini, à quelques critiques justifiées.
La mission du Pérou comprenait Godin, Bouguer, La Condamine, plusieurs auxiliaires. Elle s'adjoignit ultérieurement deux officiers espagnols, George Juan et Antonio de Ulloa. Godin, le plus ancien académicien, était le chef nominal.
Le départ eut lieu à La Rochelle, le 16 mai 1735, près d'un an avant celui des académiciens du Nord. Mais l'expédition devait durer bien davantage et les résultats ne furent élucidés que longtemps après. On n'avait pas encore mesuré un degré de latitude sur trois quand les nouvelles d'Europe apprirent le retour et le succès des académiciens du Nord, partis les derniers.
Ce retard tenait à bien des causes et n'avait pas été sans quelque profit pour la Science. On avait fait escale à la Martinique, à Saint-Domingue; on avait entrepris des recherches sur la réfraction, sur le pendule. C'est à Saint-Domingue que Bouguer imagina et fit réaliser le pendule invariable. On arriva à Quito le 13 juin 1736; mais à partir de ce moment des difficultés sans nombre surgirent, occasionnées par le climat inconstant du pays, son caractère montueux, l'impossibilité d'obtenir un concours efficace des autorités espagnoles et des indigènes et aussi, on doit le dire, par le défaut d'entente des observateurs. Chacun d'eux s'appliquait à garder le plus possible le secret de ses chiffres et à dissimuler dans ses opérations ce qui pouvait donner prise à la critique. Il fut fait, en réalité, deux triangulations distinctes et trois relations furent publiées, dues respectivement à Bouguer, à La Condamine et aux officiers espagnols. Nous devons à cette circonstance de connaître divers détails qu'un rapport fait en commun eût laissés dans l'ombre et qui sont utiles pour apprécier l'exactitude du résultat final. Cette critique a été faite d'une manière pénétrante par Delambre dans un travail demeuré longtemps inédit et que M. Bigourdan a eu le mérite de mettre en lumière 4.
Note 4: (retour) G. Bigourdan, Sur diverses mesures d'arc de méridien, faites dans la première moitié du XVIIIe siècle (Bulletin astronomique, t. XVIII, p. 320).
Bouguer et La Condamine s'étaient promis de ne point faire connaître au public les déterminations astronomiques exécutées en premier lieu, reconnues plus tard défectueuses, et qu'il