Название | Fables de La Fontaine |
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Автор произведения | Jean de la Fontaine |
Жанр | Языкознание |
Серия | |
Издательство | Языкознание |
Год выпуска | 0 |
isbn | 4064066074258 |
III
LA GRENOUILLE QUI SE VEUT FAIRE AUSSI GROSSE QUE LE BŒUF.
Une grenouille vit un bœuf
Qui lui sembla de belle taille.
Elle, qui n’étoit pas grosse en tout comme un œuf,
Envieuse, s’étend, et s’enfle, et se travaille
Pour égaler l’animal en grosseur;
Disant: Regardez bien, ma sœur;
Est-ce assez? dites-moi, n’y suis-je point encore?—
Nenni.—M’y voici donc?—Point du tout.—M’y voilà?—
Vous n’en approchez point. La chétive pécore
S’enfla si bien qu’elle creva.
Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages:
Tout bourgeois veut bâtir comme les grands seigneurs,
Tout petit prince a des ambassadeurs,
Tout marquis veut avoir des pages.
IV
LES DEUX MULETS.
Deux mulets cheminoient, l’un d’avoine chargé,
L’autre portant l’argent de la gabelle.
Celui-ci, glorieux d’une charge si belle,
N’eût voulu pour beaucoup en être soulagé.
Il marchoit d’un pas relevé,
Et faisoit sonner sa sonnette,
Quand, l’ennemi se présentant,
Comme il en vouloit à l’argent,
Sur le mulet du fisc une troupe se jette,
Le saisit au frein, et l’arrête.
Le mulet, en se défendant,
Se sent percer de coups; il gémit, il soupire.
Est-ce donc là, dit-il, ce qu’on m’avoit promis?
Ce mulet qui me suit du danger se retire,
Et moi j’y tombe et je péris!—
Ami, lui dit son camarade,
Il n’est pas toujours bon d’avoir un haut emploi;
Si tu n’avois servi qu’un meunier, comme moi,
Tu ne serois pas si malade.
V
LE LOUP ET LE CHIEN.
Un loup n’avoit que les os et la peau,
Tant les chiens faisoient bonne garde;
Ce loup rencontre un dogue aussi puissant que beau,
Gras, poli[1], qui s’étoit fourvoyé par mégarde. L’attaquer, le mettre en quartiers, Sire loup l’eût fait volontiers: Mais il falloit livrer bataille, Et le mâtin étoit de taille A se défendre hardiment. Le loup donc l’aborde humblement, Entre en propos, et lui fait compliment Sur son embonpoint, qu’il admire. Il ne tiendra qu’à vous, beau sire, D’être aussi gras que moi, lui repartit le chien. Quittez les bois, vous ferez bien: Vos pareils y sont misérables, Cancres, hères et pauvres diables, Dont la condition est de mourir de faim. Car, quoi? rien d’assuré! point de franche lippée! Tout à la pointe de l’épée! Suivez-moi, vous aurez un bien meilleur destin. Le loup reprit: Que me faudra-t-il faire?— Presque rien, dit le chien: donner la chasse aux gens Portant bâtons et mendiants; Flatter ceux du logis, à son maître complaire: Moyennant quoi votre salaire Sera force reliefs[2] de toutes les façons, Os de poulets, os de pigeons; Sans parler de mainte caresse. Le loup déjà se forge une félicité Qui le fait pleurer de tendresse. Chemin faisant, il vit le cou du chien pelé. Qu’est-ce là? lui dit-il.—Rien.—Quoi! rien?—Peu de chose.— Mais encor?—Le collier dont je suis attaché De ce que vous voyez est peut-être la cause.— Attaché! dit le loup: vous ne courez donc pas Où vous voulez?—Pas toujours; mais qu’importe?— Il importe si bien que de tous vos repas Je ne veux en aucune sorte, Et ne voudrois pas même à ce prix un trésor. Cela dit, maître loup s’enfuit, et court encor.
VI
LA GÉNISSE, LA CHÈVRE ET LA BREBIS, EN SOCIÉTÉ AVEC LE LION.
La génisse, la chèvre et leur sœur la brebis,
Avec un fier lion, seigneur du voisinage,
Firent société, dit-on, au temps jadis,
Et mirent en commun le gain et le dommage.
Dans les lacs de la chèvre un cerf se trouva pris.
Vers ses associés aussitôt elle envoie.
Eux venus, le lion par ses ongles compta;
Et dit: Nous sommes quatre à partager la proie.
Puis en autant de parts le cerf il dépeça;
Prit pour lui la première en qualité de sire.
Elle doit être à moi, dit-il; et la raison,
C’est que je m’appelle lion:
A cela l’on n’a rien à dire.
La seconde, par droit, me doit échoir encor:
Ce droit, vous le savez, c’est le droit du plus fort.
Comme le plus vaillant, je prétends la troisième.
Si quelqu’une de vous touche