Dans l’intimité de sa famille, elle parlait volontiers de ses œuvres, en écoutait la critique, était flattée des éloges, mais elle évitait de s’attribuer la réputation d’auteur. Elle lisait parfaitement. Elle aimait passionnément les beautés de la nature, savait également les admirer dans les arts d’invention. Elle avait été touchée du mérite de Gilpin, peintre renommé.
Dans le cours de sa vie elle changea rarement d’opinion sur les hommes et sur les choses.
Ses connaissances littéraires étaient étendues, sa mémoire excellente ; ses écrivains favoris furent John pour la morale, et Cowper pour la poésie. Elle admirait Richardson ; et les beaux caractères, qu’il a tracés dans ses ouvrages, étaient l’objet de ses études. La justesse de son esprit l’empêcha d’imiter le dernier dans la prolixité du style et la minutie des détails. Elle estimait moins les ouvrages de Fielding : pour elle la vérité des détails ne compensait pas suffisamment la honte du choix de sujets mauvais et trop bas.
Son talent pour créer des caractères était naturel et infini. Le style de sa correspondance était le même que celui de ses nouvelles. Tout ce que sa plume traçait était parfait ; elle avait des idées claires sur chaque sujet, ses expressions étaient toujours bien choisies, et je crois ne rien hasarder en assurant qu’elle n’a rien écrit, ni lettre, ni billet, qui ne fût digne de l’impression.
Un seul et dernier trait nous reste à tracer, c’est le plus important de tous. Elle était pieuse et pleine de religion. Elle craignait sans cesse d’offenser Dieu. Elle était instruite sur les principes de la religion, qui était pour elle un sujet de fréquentes méditations ; ses opinions sur ce point étaient parfaitement conformes à celles de l’église anglicane.
Raison et Sensibilité (1811)
Contenu