Название | Œuvres complètes de lord Byron, Tome 8 |
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Автор произведения | George Gordon Byron |
Жанр | Зарубежная классика |
Серия | |
Издательство | Зарубежная классика |
Год выпуска | 0 |
isbn |
Il doit y avoir dans cet étrange procès d'autres crimes que n'en divulgue l'acte d'accusation. Mais j'aperçois deux des Dix qui s'approchent; éloignons-nous.
C'en était trop: croyez-moi, il n'était pas convenable de poursuivre le jugement dans un pareil moment.
Ainsi donc il faudra rompre le conseil, arrêter la justice au milieu de sa carrière, parce qu'une femme viendra troubler nos délibérations?
Non, ce n'est pas le motif; mais vous avez vu l'état du prisonnier.
N'avait-il pas recouvré ses sens?
Pour les reperdre à la première épreuve.
On la lui a épargnée.
Vos murmures furent inutiles; la majorité dans le conseil était contre vous.
Oui, grâce à vous, monsieur, et grâce à notre vieux barbon de Doge, qui sut réunir les voix généreuses qui rendirent la mienne inutile.
Je suis juge; mais, je le confesse, cette portion de nos pénibles devoirs qui, en prescrivant la torture, nous ordonne de rester en présence du malheureux qu'elle déchire, me fait désirer-
Quoi?
Que vous puissiez une fois sentir ce que je sens toutes les fois.
Allez! vous êtes un enfant, faible de résolution comme de sensibilité, ballotté par le moindre souffle, ébranlé par un soupir, et attendri par une larme. Précieux juge, admirable homme d'état pour prêter son concours à ma politique!
Pour des larmes, il n'en a pas répandu.
N'a-t-il pas crié deux fois?
Un saint même, ayant déjà sous les yeux l'auréole du martyre, n'aurait pu s'en défendre, en présence du cruel raffinement de supplice qu'on lui infligeait. Mais était-ce la pitié que réclamaient ces cris? pas un mot, pas un murmure ne lui échappèrent, et ces deux hurlemens étaient arrachés par la douleur cruelle: aucune prière ne les accompagna.
Plusieurs fois il murmurait entre ses dents des sons inarticulés.
Je ne m'en suis pas aperçu; mais vous étiez plus près de lui.
Aussi l'ai-je entendu.
J'ai cru voir, et à ma grande surprise, que vous ressentiez quelque pitié, et que vous fûtes le premier à invoquer des secours quand il se trouva mal.
Je croyais qu'il allait expirer.
Mais souvent je vous ai entendu dire que sa mort et celle de son père était votre vœu le plus ardent.
J'en serais désolé, s'il mourait innocent, c'est-à-dire avant d'avoir fait l'aveu de son crime.
Eh quoi! seriez-vous aussi acharné contre sa mémoire?
Et vous, voudriez-vous que son rang passât à ses enfans, comme il arriverait s'il mourait non jugé?
Ainsi donc, guerre à eux tous!
A toute leur maison, jusqu'à ce que les leurs et les miens ne soient plus.
Ainsi, la profonde agonie de sa femme, les convulsions réprimées sur le noble front de son vieux père, dont la douleur s'échappait en faibles gémissemens, ou bien en quelques sanglots bientôt étouffés sous l'ascendant d'une grave sérénité, rien n'a pu vous toucher?
Sa haine est silencieuse, comme la souffrance dans l'ame de Foscari. L'infortuné! il m'a plus ému par son silence que n'auraient pu le faire des milliers de hurlemens. Spectacle déchirant que celui de sa femme franchissant tous les obstacles, pénétrant dans la salle du tribunal, et forçant les juges, accoutumés à de pareilles scènes, à baisser les yeux devant elle! Mais n'y pensons plus, oublions cette compassion; en plaignant le sort de nos ennemis, j'oublierais leurs premières injures, et je déconcerterais les plans de Lorédano, auquel je suis associé. Mais ma haine serait apaisée par une vengeance plus douce que celle qu'il demande, et je voudrais changer en dispositions plus humaines sa haine trop profonde. Foscari, pour le moment, obtient un court répit d'une heure: on l'accorda aux instances des membres les plus âgés, plus émus sans doute par l'apparition de sa femme dans la salle, que par les tourmens de l'accusé. – O ciel! ils approchent: comme ils sont faibles et désespérés! je ne puis, dans cette extrémité, arrêter sur eux ma vue. Éloignons-nous, et allons essayer de ramener Lorédano à des sentimens plus doux.
FIN DU PREMIER ACTE.
ACTE II
Vous plaît-il de signer le rapport maintenant ou de tarder jusqu'à demain?
Maintenant; hier je l'ai examiné: il n'y manque plus que la signature. Donnez-moi la plume. – (Le Doge s'asseoit et signe le papier.) Le voici, seigneur.
Vous avez oublié; il n'est pas signé.
Pas signé? Ah! je le vois, l'âge commence à affaiblir mes yeux. Je ne m'apercevais pas que j'avais trempé la plume sans la mouiller.
Monseigneur, c'est votre main aussi qui tremble: permettez-moi donc-
Je vous remercie; j'ai fait.
Ainsi confirmé par vous et par les Dix, cet acte va donner la paix à Venise.
Il y a bien long-tems qu'elle n'en a joui; puisse un tems aussi long s'écouler avant qu'elle ne reprenne les armes!
Voilà plus de trente-trois ans de guerres continuelles avec les Turcs ou les états de l'Italie; la république sent le besoin de quelque repos.
Sans doute: je trouvai Venise reine de l'Océan, je l'ai laissée dame de la Lombardie. Je me sens heureux d'avoir pu ajouter à son diadême les perles de Ravennes et de Brescia: d'ailleurs Crême et Bergame lui sont demeurés; et tandis que sa domination a pris sous mon règne un tel accroissement, son orgueil maritime ne recevait aucun affront.
Nous l'avouons tous, et ces bienfaits vous concilient la reconnaissance de la patrie.
Peut-être.
Elle devrait complètement se manifester.
Je ne me plains pas, monsieur.
Mon noble seigneur, pardonnez-moi.
Pourquoi?
Ah! mon cœur saigne pour vous.
Pour moi, seigneur?
Et pour votre-
Arrêtez!
Monseigneur,