Название | La dame de Monsoreau — Tome 3 |
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Автор произведения | Dumas Alexandre |
Жанр | Зарубежная классика |
Серия | |
Издательство | Зарубежная классика |
Год выпуска | 0 |
isbn |
— Et, dans l'escorte du prince, il n'y avait pas un gentilhomme montant un cheval tel que celui dont je te donne le signalement?
— Je ne connais personne ayant un pareil cheval.
— C'est bien, dit Monsoreau avec une certaine impatience d'avancer si lentement dans ses recherches, C'est bien! merci! Selle-moi Roland.
— Monsieur le comte désire Roland?
— Oui. Le prince t'aurait-il donné l'ordre de me le refuser?
— Non, monseigneur, l'écuyer de Son Altesse m'a dit, au contraire, de mettre toutes les écuries à votre disposition.
Il n'y avait pas moyen de se fâcher contre un prince qui avait de pareilles prévenances.
M. de Monsoreau fit de la tête un signe au palefrenier, lequel se mit à seller le cheval.
Lorsque cette première opération fut finie, le palefrenier détacha Roland de la mangeoire, lui passa la bride, et l'amena au comte.
— Écoute, lui dit celui-ci en lui prenant la bride des mains, et réponds-moi.
— Je ne demande pas mieux, dit le palefrenier.
— Combien gagnes-tu par an?
— Vingt écus, monsieur.
— Veux-tu gagner dix années de tes gages d'un seul coup?
— Pardieu! fit l'homme. Mais comment les gagnerai-je?
— Informe-toi qui montait hier un cheval bai-brun, avec les quatre pieds blancs et une étoile au milieu du front.
— Ah! monsieur, dit le palefrenier, ce que vous me demandez là est bien difficile; il y a tant de seigneurs qui viennent rendre visite à Son Altesse.
— Oui; mais deux cents écus, c'est un assez joli denier pour qu'on risque de prendre quelque peine à les gagner.
— Sans doute, monsieur le comte, aussi je ne refuse pas de chercher, tant s'en faut.
— Allons, dit le comte, ta bonne volonté me plaît. Voici d'abord dix écus pour te mettre en train; tu vois que tu n'auras point tout perdu.
— Merci, mon gentilhomme.
— C'est bien; tu diras au prince que je suis allé reconnaître le bois pour la chasse qu'il m'a commandée.
Le comte achevait à peine ces mots, que la paille cria derrière lui sous les pas d'un nouvel arrivant.
Il se retourna.
— Monsieur de Bussy! s'écria le comte.
— Eh! bonjour, monsieur de Monsoreau, dit Bussy; vous à Angers, quel miracle!
— Et vous, monsieur, qu'on disait malade!
— Je le suis, en effet, dit Bussy; aussi mon médecin m'ordonne-t-il un repos absolu; il y a huit jours que je ne suis sorti de la ville. Ah! ah! vous allez monter Roland, à ce qu'il paraît? C'est une bête que j'ai vendue à M. le duc d'Anjou, et dont il est si content qu'il la monte presque tous les jours.
Monsoreau pâlit.
— Oui, dit-il, je comprends cela, c'est un excellent animal.
— Vous n'avez pas eu la main malheureuse de le choisir ainsi du premier coup, dit Bussy.
— Oh! ce n'est point d'aujourd'hui que nous faisons connaissance, répliqua le comte, je l'ai monté hier.
— Ce qui vous a donné l'envie de le monter encore aujourd'hui?
— Oui, dit le comte.
— Pardon, reprit Bussy, vous parliez de nous préparer une chasse?
— Le prince désire courir un cerf.
— Il y en a beaucoup, à ce que je me suis laissé dire, dans les environs.
— Beaucoup.
— Et de quel côté allez-vous détourner l'animal?
— Du côté de Méridor.
— Ah! très-bien, dit Bussy en pâlissant à son tour malgré lui.
— Voulez-vous m'accompagner? demanda Monsoreau.
— Non, mille grâces, répondit Bussy. Je vais me coucher. Je sens la fièvre qui me reprend.
— Allons, bien, s'écria du seuil de l'écurie une voix sonore, voilà encore M. de Bussy levé sans ma permission.
— Le Haudoin, dit Bussy; bon, me voilà sûr d'être grondé. Adieu, comte. Je vous recommande Roland.
— Soyez tranquille.
Bussy s'éloigna, et M. de Monsoreau sauta en selle.
— Qu'avez-vous donc? demanda le Haudoin; vous êtes si pâle, que je crois presque moi-même que vous êtes malade.
— Sais-tu où il va? demanda Bussy.
— Non.
— Il va à Méridor.
— Eh bien! aviez-vous espéré qu'il passerait à côté?
— Que va-t-il arriver, mon Dieu! après ce qui s'est passé hier?
— Madame de Monsoreau niera.
— Mais il a vu.
— Elle lui soutiendra qu'il avait la berlue.
— Diane n'aura pas cette force-là.
— Oh! monsieur de Bussy, est-il possible que vous ne connaissiez pas mieux les femmes!
— Remy, je me sens très-mal.
— Je crois bien. Rentrez chez vous. Je vous prescris, pour ce matin...
— Quoi?
— Une daube de poularde, une tranche de jambon, et une bisque aux écrevisses.
— Eh! je n'ai pas faim.
— Raison de plus pour que je vous ordonne de manger.
— Remy, j'ai le pressentiment que ce bourreau va faire quelque scène tragique à Méridor. En vérité, j'eusse dû accepter de l'accompagner quand il me l'a proposé.
— Pour quoi faire?
— Pour soutenir Diane.
— Madame Diane se soutiendra bien toute seule, je vous l'ai déjà dit et je vous le répète; et, comme il faut que nous en fassions autant, venez, je vous prie. D'ailleurs, il ne faut pas qu'on vous voie debout. Pourquoi êtes-vous sorti malgré mon ordonnance?
— J'étais trop inquiet, je n'ai pu y tenir.
Remy haussa les épaules, emmena Bussy, et l'installa, portes closes, devant une bonne table, tandis que M. de Monsoreau sortait d'Angers par la même porte que la veille.
Le comte avait eu ses raisons pour redemander Roland, il avait voulu s'assurer si c'était par hasard ou par habitude que cet animal, dont chacun vantait l'intelligence, l'avait conduit au pied du mur du parc. En conséquence, en sortant du palais, il lui avait mis la bride sur le cou.
Roland n'avait pas manqué à ce que son cavalier attendait de lui. A peine hors de la porte, il avait pris à gauche; M. de Monsoreau l'avait laissé faire; puis à droite, et M. de Monsoreau l'avait laissé faire encore.
Tous deux s'étaient donc engagés dans le charmant sentier fleuri, puis dans les taillis, puis dans les hautes futaies. Comme la veille, à mesure que Roland approchait de Méridor, son trot s'allongeait; enfin son trot se changea