La dame de Monsoreau — Tome 3. Dumas Alexandre

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Название La dame de Monsoreau — Tome 3
Автор произведения Dumas Alexandre
Жанр Зарубежная классика
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Издательство Зарубежная классика
Год выпуска 0
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oui, les Angevins! cria Quélus.

      — Où sont-ils? hurla Schomberg.

      — Qu'on les éventre! vociféra Maugiron.

      — Cent potences pour cent Angevins! reprit le roi.

      Chicot ne pouvait rester muet dans cette fureur universelle: il tira son épée avec un geste de taille-bras, et, s'escrimant du plat à droite et à gauche, il rossa les mignons et battit les murs en répétant avec des yeux farouches:

      — Oh! ventre-de-biche! oh! mâle-rage! ah! damnation! les Angevins, mordieu! mort aux Angevins!

      Ce cri: Mort aux Angevins! fut entendu de toute la ville comme le cri des mères Israélites fut entendu par tout Raina.

      Cependant Henri avait disparu.

      Il avait songé à sa mère, et, se glissant hors de la chambre sans mot dire, il était allé trouver Catherine, un peu négligée depuis quelque temps, et qui, renfermée dans son indifférence affectée, attendait, avec sa pénétration florentine, une bonne occasion de voir surnager sa politique.

      Lorsque Henri entra, elle était à demi couchée, pensive, dans un grand fauteuil, et elle ressemblait plus, avec ses joues grasses, mais un peu jaunâtres, avec ses yeux brillants, mais fixes, avec ses mains potelées, mais pâles, à une statue de cire exprimant la méditation qu'à un être animé qui pense.

      Mais, à la nouvelle de l'évasion de François, nouvelle que Henri donna, au reste, sans ménagement aucun, tout embrasé qu'il était de colère et de haine, la statue parut se réveiller tout à coup, quoique le geste qui annonçait ce réveil se bornât, pour elle, à s'enfoncer davantage encore dans son fauteuil et à secouer la tête sans rien dire.

      — Eh! ma mère, dit Henri, vous ne vous écriez pas?

      — Pourquoi faire, mon fils? demanda Catherine.

      — Comment! cette évasion de votre fils ne vous paraît pas criminelle, menaçante, digne des plus grands châtiments?

      — Mon cher fils, la liberté vaut bien une couronne, et rappelez-vous que je vous ai, à vous-même, conseillé de fuir quand vous pouviez atteindre cette couronne.

      — Ma mère, on m'outrage.

      Catherine haussa les épaules.

      — Ma mère, on me brave.

      — Eh! non, dit Catherine, on se sauve, voilà tout.

      — Ah! dit Henri, voilà comme vous prenez mon parti!

      — Que voulez-vous dire, mon fils?

      — Je dis qu'avec l'âge les sentiments s'émoussent; je dis...

      Il s'arrêta.

      — Que dites-vous? reprit Catherine avec son calme habituel.

      — Je dis que vous ne m'aimez plus comme autrefois.

      — Vous vous trompez, dit Catherine avec une froideur croissante. Vous êtes mon fils bien-aimé, Henri; mais celui dont vous vous plaignez est aussi mon fils.

      — Ah! trêve à la morale maternelle, madame, dit Henri furieux; nous connaissons ce que cela vaut.

      — Eh! vous devez le connaître mieux que personne, mon fils; car, vis-à-vis de vous, ma morale a toujours été de la faiblesse.

      — Et, comme vous en êtes aux repentirs, vous vous repentez.

      — Je sentais bien que nous en viendrions là, mon fils, dit Catherine; voilà pourquoi je gardais le silence.

      — Adieu, madame, adieu, dit Henri; je sais ce qu'il me reste à faire, puisque, chez ma mère même, il n'y a plus de compassion pour moi. Je trouverai des conseillers capables de seconder mon ressentiment et de m'éclairer dans cette rencontre.

      — Allez, mon fils, dit tranquillement la Florentine, et que l'esprit de Dieu soit avec ces conseillers, car ils en auront bien besoin pour vous tirer d'embarras.

      Et elle le laissa s'éloigner sans faire un geste, sans dire un mot pour le retenir.

      — Adieu, madame, répéta Henri. Mais, près de la porte, il s'arrêta.

      — Henri, adieu, dit la reine; seulement encore un mot. Je ne prétends pas vous donner un conseil, mon fils; vous n'avez pas besoin de moi, je le sais; mais priez vos conseillers de bien réfléchir avant d'émettre leur avis, et de bien réfléchir encore avant de mettre cet avis à exécution.

      — Oh! oui, dit Henri, se rattachant à ce mot de sa mère et en profitant pour ne pas aller plus loin, car la circonstance est difficile, n'est-ce pas, madame?

      — Grave, dit lentement Catherine en levant les yeux et les mains au ciel, bien grave, Henri.

      Le roi, frappé de cette expression de terreur qu'il croyait lire dans les yeux de sa mère, revint près d'elle.

      — Quels sont ceux qui l'ont enlevé? en avez-vous quelque idée, ma mère?

      Catherine ne répondit point.

      — Moi, dit Henri, je pense que ce sont les Angevins.

      Catherine sourit avec cette finesse qui montrait toujours en elle un esprit supérieur veillant pour terrasser et confondre l'esprit d'autrui.

      — Les Angevins? répéta-t-elle.

      — Vous ne le croyez pas, dit Henri, tout le monde le croit.

      Catherine fit encore un mouvement d'épaules.

      — Que les autres croient cela, bien, dit-elle; mais vous, mon fils, enfin!

      — Quoi donc! madame!.. Que voulez-vous dire?.. Expliquez-vous, je vous en supplie.

      — A quoi bon m'expliquer?

      — Votre explication m'éclairera.

      — Vous éclairera! Allons donc! Henri, je ne suis qu'une femme vieille et radoteuse; ma seule influence est dans mon repentir et dans mes prières.

      — Non, parlez, parlez, ma mère, je vous écoute. Oh! vous êtes encore, vous serez toujours notre âme à nous tous. Parlez.

      — Inutile; je n'ai que des idées de l'autre siècle, et la défiance fait tout l'esprit des vieillards. La vieille Catherine! donner, à son âge, un conseil qui vaille encore quelque chose! Allons donc! mon fils, impossible!

      — Eh bien! soit, ma mère, dit Henri; refusez-moi votre secours, privez-moi de votre aide. Mais, dans une heure, voyez-vous, que ce soit votre avis ou non, et je le saurai alors, j'aurai fait pendre tous les Angevins qui sont à Paris.

      — Faire pendre tous les Angevins! s'écria Catherine avec cet étonnement qu'éprouvent les esprits supérieurs lorsqu'on dit devant eux quelque énormité.

      — Oui, oui, pendre, massacrer, assassiner, brûler. A l'heure qu'il est, mes amis courent déjà la ville pour rompre les os à ces maudits, à ces brigands, à ces rebelles!..

      — Qu'ils s'en gardent, malheureux, s'écria Catherine emportée par le sérieux de la situation; ils se perdraient eux-mêmes, ce qui ne serait rien; mais ils vous perdraient avec eux.

      — Comment cela?

      — Aveugle! murmura Catherine; les rois auront donc éternellement des jeux pour ne pas voir!

      Et elle joignit les mains.

      — Les rois ne sont rois qu'à la condition qu'ils vengeront les injures qu'on leur fait, car alors leur vengeance est une justice, et, dans ce cas surtout, tout mon royaume se lèvera pour me défendre.

      — Fou, insensé, enfant, murmura la Florentine.

      — Mais pourquoi cela, comment cela?

      — Pensez-vous