Le Ciel De Nadira. Giovanni Mongiovì

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Название Le Ciel De Nadira
Автор произведения Giovanni Mongiovì
Жанр Исторические любовные романы
Серия
Издательство Исторические любовные романы
Год выпуска 0
isbn 9788835411437



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ni rien d’autre que des siciliens. Des Siciliens sarrasins et des siciliens grecs, mieux encore chrétiens – tout comme il y avait des siciliens de Judée – mais à la fin ils étaient tous des siciliens. A l’exception des nouveaux arrivés qui étaient exclus du concept de sicilien, ceux qui étaient passés de l’Afrique en Sicile aux temps de l’invasion de la dynastie des Zirides jusqu’à ce que Abd-Allah ne fut retourné de l’autre côté de la Méditerranée.

      Ceux-ci, dévoués à l’Islam comme les autres, la plupart d’ethnie berbère, étaient définis africains, juste parce qu’ils provenaient de la région que le monde arabe définissait Ifrīqiya15. Les derniers africains étaient arrivés à peine quelques années auparavant, ils s’étaient enfuis des dévastations qui se déchaînaient sur la terre de leur provenance. Parvenir à créer un seul peuple entre siciliens et africains, bien que tous croyants en Allah, était une entreprise bien plus compliquée – dans le passé la question avait même débouché en un désordre civil – plutôt qu’à réussir à intégrer chrétiens et hébreux dans les tissus de la société islamique. La législation de la sharia16 sur ces derniers, en effet, était claire, rien ou presque rien ne pouvait être interprété ; ils étaient des dhimmi, des vassaux, contraints de payer la jizja, la capitation, tout en ayant le droit d’exister dans leur propre foi. Les africains au contraire étaient de vrais antagonistes, ceux avec lesquels les sarrasins siciliens devaient se partager la primauté de dominateurs.

      Au Rabaḍ, toutefois, on n’avait jamais vu d’africains, le vrai problème de la journée semblait être celui de faire bonne impression devant le Qā’id ibn al-Ḥawwās, l’émir de Qasr Yanna, venu inexplicablement rendre vi-site à un de ses collecteurs d’impôts.

      “ Si Corrado avait été ici ! ” s’exclama Apollonia dès qu’elle vit la caravane à l’entrée du village.

      Apollonia était une femme qui avait un peu plus de vingt ans et avait un bel aspect, des cheveux ondulés châtains et des yeux noisette. La blancheur de sa peau la rendait encore plus attrayante, car parmi les arabes les jeunes filles aux caractéristiques européennes étaient les plus recherchées. S’il n’y avait pas eu l’obstacle de sa religion on lui aurait certainement dé-jà fait la cour et s’il n’y avait pas eu la petite dimension du Rabaḍ et son atmosphère familière, quelqu’un l’aurait sûrement induit à se convertir avec la promesse d’obtenir un mariage avantageux.

      Michele était un peu plus jeune que Corrado, il ressemblait beaucoup à son père. Le jeune garçon semblait né pour travailler et bien qu’il était très grand, il était robuste et infatigable. Il lui manquait également quelques dents, il les avait cassées à l’âge de dix ans quand il avait tenté d’enlever un gros clou d’une poutrelle.

      “ A cette heure-ci Corrado aura certainement déjà entendu la nouvelle et sera en train de remonter du potager avec notre père. ” répondit Michele

      “ Quel homme sera t-il donc Qā’id ? ” demanda Apollonia, plus à elle même qu’à son frère.

      Michele la regarda avec perplexité et, pris de jalousie, répondit :

      “ Tu devrais peut-être rester à la maison comme font beaucoup de femmes mahométanes. ”

      “ Je ne connais personne ici au Rabaḍ qui tient sous clé sa sœur. ”

      “ Dehors ça fait un bout de temps que l’on ne voit pas la sœur de Umar, et si on la voit c’est avec le visage couvert. ”

      “ Ça signifie qu’il existe un frère plus jaloux que toi. Et puis il suffit des yeux de Nadira pour attirer les hommes. ”

      Les dernières paroles d’Apollonia étaient le pivot de nombreuses choses qui dès ce moment seraient arrivées…

      Le Qā’id avançait dans les ruelles parmi les émeutes de la foule. Ali ibn Ni’ma, plus communément connu comme ibn al-Hawwās, était très aimé par les gens. Son nom lui même signifiait ” le démagogue ”, celui qui at-tire les faveurs du peuple. Et d’ailleurs son ascension n’aurait pu avoir lieu sans le soutien des gens et sans ses dons charismatiques ; un esclave de race berbère qui s’était libéré et qui était enfin devenu le Qā’id de l’entière Sicile centrale.

      Ibn al-Ḥawwās arrivait en chevauchant un très beau cheval bien attelé d’ornements jaunes et verts. Les pensées d’Apollonia furent déçues quand elle se rendit compte que le seigneur de Qasr Yanna n’était pas un jeune homme prestant comme elle l’avait imaginé, mais était d’âge moyen, aux cheveux grisonnants et légèrement en surpoids. Toutefois son aspect n’était pas désagréable ; et pour sûr la plupart des jeunes filles qui l’acclamait à son passage aurait tout fait pour recevoir ses attentions.

      En plus de la vingtaine d’hommes armés qui escortaient le Qā’id, une femme en habits noirs attirait l’attention. Celle-ci chevauchait en amazone le destrier immédiatement après celui de son seigneur, elle était accompagnée d’une paire de servantes. En outre il y avait un type vêtu d’un tel luxe qu’il était juste le second après ibn al-Ḥawwās.

      Umar alla à l’entrée, il présenta ses hommages et invita son maître à entrer dans son ” indigne demeure ” ; ainsi appela t-il sa maison. Ali, le Qā’id, dès qu’il descendit de son cheval présenta bien vite les personnes qui le suivaient

      “ Ma sœur Maimuna et Bashir, mon Vizir17 ”.

      Pendant que Umar fit un signe de la main pour indiquer à ses proches, qui observaient par la porte, de s’approcher.

      “ Ma mère, Jala… ma femme Ghadda et mes enfants Rashid et Fatima ; voici ma sœur, Nadira. ”

      Chacune de ces femmes s’inclina mains jointes devant le Qā’id et ce-lui-ci répondit

      “ Je ferais envoyer des dons pour récompenser la beauté de cette mai-son. ” en posant plus d’un regard sur les yeux de Nadira.

      Les plus beaux tapis et les coussins les plus prestigieux avaient été pré-parés en vitesse sur le pavement de la plus grande pièce, pour que les hommes puissent s’asseoir et converser entre eux. Dans les cuisines même le tannūr18 avait été allumé pour cuire le pain tandis que les jeunes couraient à la source la plus proche pour porter de l’eau fraîche et courante aux invités. Ils s’assirent tout autour de la pièce, tandis que les femmes de la maison invitaient Maimuna à s’unir à eux de l’autre côté, derrière, sous une espèce de hangar délimité par une haie formée de roses.

      Une rangée de femmes parmi les domestiques commencèrent à porter la nourriture, les fruits, mais aussi les pâtisseries au miel, le pain, les dates à peine cueillis et les jus de grenade. A ce point, le Vizir, se lissant la barbe à l’étrange forme pointue commença ses réflexions et ses questions tech-niques sur la gestion du village :

      “ Le lieu est agréable et les personnes sont dévouées à leur Qā’id ; tout le mérite est pour vous ? ”

      “ Il va à chaque habitant du Rabaḍ et au joug agréable que notre aimé Qā’id leur réserve. ”

      “ Quels sont les nombres de la conscription du giund19 ? ” ” Quarante et un hommes, déjà armés. ”

      “ Les dhimmi te sont soumis ? ”“ Il y a une seule famille de chrétiens…. des paysans parmi les plus paisibles. ”

      “ Une seule ? Ailleurs, dans le iqlīm20 de Mazara, les chrétiens sont re-groupés en communautés, bien souvent modestes. ”

      “ Les maraudeurs… avez-vous subi des attaques ? ” demanda à ce point Ali ibn al-Hawwās.

      “Nous subissons des attaques depuis le temps de mon père. La dernière fut quand Jirjis Maniakis se déchaîna sur la côte orientale, il y a vingt



<p>15</p>

Ifrīqiya : région correspondant à l’actuelle Tunisie et à certaines parties de l’Algérie et de la Libye. Littéralement ”Afrique ”, étant le terme dérivé du fait que les romains et ensuite les byzantins définissaient Afrique (province d’Afrique).

<p>16</p>

Sharia : loi de la religion islamique.

<p>17</p>

Vizir : important conseillé politique et religieux du calife, du sultan et de l’émir.

<p>18</p>

Tannūr : littéralement ” four ”. D’où le sicilien ” tannura”.

<p>19</p>

Giund : troupe, armée.

<p>20</p>

Iqlīm : subdivision administrative, province. Dans la Sicile musulmane il en existait historiquement trois. Elles furent par être appelées ”Vallées ” durant l’époque normande. Afin de faciliter l’identification de ces divisions politiques, il suffit de tenir compte du fait que la Sicile a une forme triangulaire, en tirant une bissectrice de chaque côté, on arrive à un point central du triangle. Les trois parties qui en résultent correspondent aux trois vallées historiques de la Sicile (iqlīm durant la période musulmane ).

…de Demona : correspondant à la Sicile Nord-Orientale (de Demona, ville située sur les Nebro – di ).

…de Mazara : correspondant à la Sicile occidentale (de Mazara, l’actuelle Mazara del Vallo).

…de Noto : correspondant à la Sicile sud-orientale ( de la ville de Noto ).