Название | La Traque Zéro |
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Автор произведения | Джек Марс |
Жанр | Шпионские детективы |
Серия | |
Издательство | Шпионские детективы |
Год выпуска | 0 |
isbn | 9781094312743 |
Rais était assis dans un fauteuil près de la porte de cette chambre d’hôtel miteuse avec une moquette orange et des murs jaunes. La pièce sentait l’humidité et la salle de bains empestait la javel. Ils étaient là depuis quatre heures. Le vieux réveil sur la table de chevet lui indiquait en chiffres rouges LED qu’il était deux heures et demie du matin. La télévision était allumée sur une chaîne d’infos avec le volume bas.
Un break blanc était garé juste à l’extérieur, à quelques mètres de la porte. L’assassin l’avait volé à la nuit tombée sur le parking d’un concessionnaire de voitures d’occasion. C’était la troisième fois qu’ils changeaient de véhicule depuis le matin : du pick-up de Thompson à la berline bleue et, à présent, ce SUV blanc. À chaque fois, Rais avait changé de direction, allant d’abord au sud, puis de nouveau au nord et, enfin, au nord-est vers la côte.
Maya avait bien compris son manège : il jouait au jeu du chat et de la souris, laissant les véhicules volés à différents endroits afin que les autorités n’aient aucune idée de leur direction. Leur chambre d’hôtel était à environ quinze kilomètres de Bayonne, non loin de la frontière entre le New Jersey et l’état de New York. Le motel en lui-même était un bâtiment tout en longueur si délabré et tellement crade qu’en passant devant, on avait l’impression qu’il était fermé depuis des années.
Les filles n’avaient pas beaucoup dormi. Sara avait fait de petites siestes dans les bras de Maya, vingt à trente minutes par-ci, par-là avant de se redresser d’un coup en gémissant, comme si elle se réveillait d’un rêve et se rappelait où elle était finalement.
Maya avait combattu sa fatigue, essayant de rester éveillée aussi longtemps que possible. Elle savait que Rais allait forcément s’endormir à un moment et que ça pourrait lui fournir les quelques précieuses minutes dont elles avaient besoin pour s’enfuir. Mais le motel était situé dans une zone industrielle. Elle avait vu quand ils s’étaient garés qu’il n’y avait pas de maisons aux alentours, ni d’entreprise à proximité susceptible de rester ouverte à cette heure de la nuit. Elle n’était même pas certaine qu’il y ait qui que ce soit à la réception du motel. Elles n’auraient nulle part où aller dans la nuit et les menottes allaient les ralentir.
Pour finir, Maya avait succombé à la fatigue et s’était assoupie sans le vouloir. Elle était endormie depuis moins d’une heure quand elle se réveilla avec un léger halètement. Et elle haleta de nouveau quand elle vit Rais assis dans le fauteuil à moins d’un mètre d’elle.
Il regardait droit vers elle, les yeux grands ouverts, sans ciller.
Elle en eut la chair de poule… Une bonne minute s’écoula ainsi, puis une autre. Elle l’observait, le fixant des yeux, sa crainte teintée de curiosité. C’est alors qu’elle comprit.
Il dort avec les yeux ouverts.
Elle se demandait ce qui était le plus perturbant : se réveiller et se rendre compte qu’il l’observait ou qu’il dormait les yeux ouverts.
Puis il cligna des yeux et elle haleta une nouvelle fois, surprise, la gorge complètement nouée.
“Nerfs faciaux endommagés,” dit-il à voix basse, presque en chuchotant. “Il paraît que c’est assez perturbant à regarder.” Il montra le carton du chinois à emporter qui avait été livré dans leur chambre bien des heures plus tôt. “Tu devrais manger.”
Elle fit non de la tête, berçant Sara avec ses genoux.
La chaîne d’infos répétait tout bas les principaux événements survenus dans la journée. Une organisation terroriste était reconnue responsable d’avoir libéré un virus mortel de variole sur l’Espagne et d’autres parties d’Europe. Son leader, ainsi que le virus, avaient été appréhendés et plusieurs autres membres étaient à présent sous les verrous. L’après-midi même, les États-Unis avaient levé l’interdiction du trafic international pour tous les pays, sauf le Portugal, l’Espagne et la France où il y avait encore des cas isolés de variole mutée. Mais tout le monde était confiant quant à la maîtrise de la situation par l’Organisation Mondiale de la Santé.
Maya s’était doutée que son père avait été envoyé pour apporter son aide dans cette affaire. Elle se demandait maintenant si c’était lui qui avait arrêté le principal responsable. Elle se demanda aussi s’il était déjà renté à la maison.
Et elle se demanda enfin s’il avait trouvé le corps de M. Thompson, s’il avait constaté leur disparition… ou si qui que ce soit s’était rendu compte de leur disparition.
Rais était assis dans le fauteuil jaune avec un téléphone mobile posé sur l’accoudoir. C’était un téléphone à l’ancienne, presque préhistorique par rapport aux standards actuels. Il ne pouvait servir à rien d’autre que passer des appels et envoyer des messages. Un téléphone à carte prépayée : Maya avait entendu parler de ce genre de trucs à la TV. Il n’était pas connecté à internet et ne possédait pas de GPS, avait-elle appris en regardant des reportages sur les procédures de police. Donc, on ne pouvait le tracer qu’avec le numéro de téléphone, mais encore fallait-il l’avoir.
On aurait dit que Rais attendait quelque chose : un appel ou un message. Maya mourait d’envie de savoir où ils allaient, si toutefois il avait une destination. Elle soupçonnait Rais de vouloir que leur père les trouve, les traque, mais l’assassin ne semblait pas du tout pressé de se rendre où que ce soit. Est-ce que c’était un jeu pour lui, se demanda-t-elle, de voler des voitures et de changer de direction, d’échapper aux autorités dans l’espoir que leur père serait celui qui les trouverait en premier ? Est-ce qu’ils allaient continuer de bouger d’un endroit à l’autre jusqu’à ce qu’il y ait un affrontement ?
Soudain, une sonnerie monocorde retentit depuis le téléphone à côté de Rais. Sara sursauta légèrement dans ses bras à cause de ce son aigu.
“Allô.” Rais répondit froidement au téléphone. “Ano.” Il se leva du fauteuil pour la première fois depuis trois heures et passa de l’anglais à une langue étrangère. Maya ne connaissait que l’anglais et le français, sachant reconnaître une poignée d’autres langues à partir de mots simples et d’accents, mais celle-ci ne lui disait rien. C’était une langue gutturale, mais pas totalement désagréable.
Russe ? pensa-t-elle. Non. Polonais, peut-être. Mais ça ne servait à rien de chercher à deviner : elle ne pouvait pas en être sûre et le savoir n’allait pas l’aider à comprendre quoi que ce soit de la discussion.
Pourtant, elle écouta, constatant l’usage fréquent des sons “z” et “-ski”, essayant de déceler une racine de mot familière, mais elle n’en trouva aucune.
Toutefois, elle parvint à comprendre un seul mot qui lui glaça le sang.
“Dubrovnik,” dit l’assassin sur un ton de confirmation.
Dubrovnik ? La géographie était l’une de ses matières préférées et Dubrovnik était une ville du sud-ouest de la Croatie, destination touristique populaire avec son fameux port. Mais le plus important était ce que signifiait ce mot prononcé.
Ça voulait dire que Rais comptait leur faire quitter le pays.
“Ano,” dit-il (ce qui semblait être une affirmation et elle supposa que ça voulait dire “oui”), puis “Port Jersey.”
Il n’y avait eu que deux mots en anglais de toute la conversation, en dehors de “allô,” et elle les