Жерминаль. Книга для чтения на французском языке. Эмиль Золя

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Название Жерминаль. Книга для чтения на французском языке
Автор произведения Эмиль Золя
Жанр Литература 19 века
Серия Чтение в оригинале (Каро)
Издательство Литература 19 века
Год выпуска 2005
isbn 5-89815-503-1



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noir?

      – Le vieux mineur qui revient dans la fosse et qui tord le cou aux vilaines filles.

      Il la regardait, craignant qu’elle ne se moquât de lui.

      – Tu crois à ces bêtises, tu ne sais donc rien?

      – Si fait, moi, je sais lire et écrire… Ça rend service chez nous, car du temps de papa et de maman, on n’apprenait pas.

      Elle était décidément très gentille. Quand elle aurait fini sa tartine, il la prendrait et la baiserait sur ses grosses lèvres roses. C’était une résolution de timide, une pensée de violence qui étranglait sa voix. Ces vêtements de garçon, cette veste et cette culotte sur cette chair de fille, l’excitaient et le gênaient. Lui, avait avalé sa dernière bouchée. Il but à la gourde, la lui rendit pour qu’elle la vidât. Maintenant, le moment d’agir était venu, et il jetait un coup d’oeil inquiet vers les mineurs, au fond, lorsqu’une ombre boucha la galerie.

      Depuis un instant, Chaval, debout, les regardait de loin. Il s’avança, s’assura que Maheu ne pouvait le voir; et, comme Catherine était restée à terre, sur son séant, il l’empoigna par les épaules, lui renversa la tête, lui écrasa la bouche sous un baiser brutal, tranquillement, en affectant de ne pas se préoccuper d’Étienne. Il y avait, dans ce baiser, une prise de possession, une sorte de décision jalouse.

      Cependant, la jeune fille s’était révoltée.

      – Laisse-moi, entends-tu!

      Il lui maintenait la tête, il la regardait au fond des yeux. Ses moustaches et sa barbiche rouges flambaient dans son visage noir, au grand nez en bec d’aigle. Et il la lâcha enfin, et il s’en alla, sans dire un mot.

      Un frisson avait glacé Étienne. C’était stupide d’avoir attendu. Certes, non, à présent, il ne l’embrasserait pas, car elle croirait peut-être qu’il voulait faire comme l’autre. Dans sa vanité blessée, il éprouvait un véritable désespoir.

      – Pourquoi as-tu menti? dit-il à voix basse. C’est ton amoureux.

      – Mais non, je te jure! cria-t-elle. Il n’y a pas ça entre nous. Des fois, il veut rire… Même qu’il n’est pas d’ici, voilà six mois qu’il est arrivé du Pas-de-Calais.

      Tous deux s’étaient levés, on allait se remettre au travail. Quand elle le vit si froid, elle parut chagrine. Sans doute, elle le trouvait plus joli que l’autre, elle l’aurait préféré peut-être. L’idée d’une amabilité, d’une consolation la tracassait; et, comme le jeune homme, étonné, examinait sa lampe qui brûlait bleue, avec une large collerette pâle, elle tenta au moins de le distraire.

      – Viens, que je te montre quelque chose, murmura-t-elle d’un air de bonne amitié.

      Lorsqu’elle l’eut mené au fond de la taille, elle lui fit remarquer une crevasse, dans la houille. Un léger bouillonnement s’en échappait, un petit bruit, pareil à un sifflement d’oiseau.

      – Mets ta main, tu sens le vent… C’est du grisou.

      Il resta surpris. Ce n’était que ça, cette terrible chose qui faisait tout sauter? Elle riait, elle disait qu’il y en avait beaucoup ce jour-là, pour que la flamme des lampes fût si bleue.

      – Quand vous aurez fini de bavarder, fainéants! cria la rude voix de Maheu.

      Catherine et Étienne se hâtèrent de remplir leurs berlines et les poussèrent au plan incliné, l’échine raidie, rampant sous le toit bossué de la voie. Dès le second voyage, la sueur les inondait et leurs os craquaient de nouveau.

      Dans la taille, le travail des haveurs avait repris. Souvent, ils abrégeaient le déjeuner, pour ne pas se refroidir; et leurs briquets, mangés aussi loin du soleil, avec une voracité muette, leur chargeaient de plomb l’estomac. Allongés sur le flanc, ils tapaient plus fort, ils n’avaient que l’idée fixe de compléter un gros nombre de berlines.

      Tout disparaissait dans cette rage du gain disputé si rudement. Ils cessaient de sentir l’eau qui ruisselait et enflait leurs membres, les crampes des attitudes forcées, l’étouffement des ténèbres, où ils blêmissaient ainsi que des plantes mises en cave. Pourtant, à mesure que la journée s’avançait, l’air s’empoisonnait davantage, se chauffait de la fumée des lampes, de la pestilence des haleines, de l’asphyxie du grisou, gênant sur les yeux comme des toiles d’araignée, et que devait seul balayer l’aérage de la nuit. Eux, au fond de leur trou de taupe, sous le poids de la terre, n’ayant plus de souffle dans leurs poitrines embrasées, tapaient toujours.

      V

      Maheu, sans regarder à sa montre laissée dans sa veste, s’arrêta et dit:

      – Bientôt une heure… Zacharie, est-ce fait?

      Le jeune homme boisait depuis un instant. Au milieu de sa besogne, il était resté sur le dos, les yeux vagues, rêvassant aux parties de crosse qu’il avait faites la veille. Il s’éveilla, il répondit:

      – Oui, ça suffira, on verra demain.

      Et il retourna prendre sa place à la taille. Levaque et Chaval, eux aussi, lâchaient la rivelaine. Il y eut un repos. Tous s’essuyaient le visage sur leurs bras nus, en regardant la roche du toit, dont les masses schisteuses se fendillaient. Ils ne causaient guère que de leur travail.

      – Encore une chance, murmura Chaval, d’être tombé sur des terres qui déboulent!.. Ils n’ont pas tenu compte de ça, dans le marchandage.

      – Des filous! grogna Levaque. Ils ne cherchent qu’à nous foutre dedans.

      Zacharie se mit à rire. Il se fichait du travail et du reste, mais ça l’amusait d’entendre empoigner la Compagnie. De son air placide, Maheu expliqua que la nature des terrains changeait tous les vingt mètres. Il fallait être juste, on ne pouvait rien prévoir. Puis, les deux autres continuant à déblatérer contre les chefs, il devint inquiet, il regarda autour de lui.

      – Chut! en voilà assez!

      – Tu as raison, dit Levaque, qui baissa également la voix. C’est malsain.

      Une obsession des mouchards les hantait, même à cette profondeur, comme si la houille des actionnaires, encore dans la veine, avait eu des oreilles.

      – N’empêche, ajouta très haut Chaval d’un air de défi, que si ce cochon de Dansaert me parle sur le ton de l’autre jour, je lui colle une brique dans le ventre… Je ne l’empêche pas, moi, de se payer les blondes qui ont la peau fine.

      Cette fois, Zacharie éclata. Les amours du maître-porion et de la Pierronne étaient la continuelle plaisanterie de la fosse. Catherine elle-même, appuyée sur sa pelle, en bas de la taille, se tint les côtes et mit d’une phrase Étienne au courant; tandis que Maheu se fâchait, pris d’une peur qu’il ne cachait plus.

      – Hein? tu vas te taire!.. Attends d’être tout seul, si tu veux qu’il t’arrive du mal.

      Il parlait encore, lorsqu’un bruit de pas vint de la galerie supérieure. Presque aussitôt, l’ingénieur de la fosse, le petit Négrel, comme les ouvriers le nommaient entre eux, parut en haut de la taille, accompagné de Dansaert, le maître-porion.

      – Quand je le disais! murmura Maheu. Il y en a toujours là, qui sortent de la terre.

      Paul Négrel, neveu de M. Hennebeau, était un garçon de vingt-six ans, mince et joli, avec des cheveux frisés et des moustaches brunes. Son nez pointu, ses yeux vifs, lui donnaient un air de furet aimable, d’une intelligence sceptique, qui se changeait en une autorité cassante, dans ses rapports avec les ouvriers. Il était vêtu comme eux, barbouillé comme eux de charbon; et, pour les réduire au respect, il montrait un courage à se casser les os, passant par les endroits les plus difficiles, toujours le premier sous les éboulements et dans les coups de grisou.

      – Nous y sommes, n’est-ce pas? Dansaert, demanda-t-il.

      Le maître-porion, un Belge à face épaisse, au gros nez sensuel, répondit avec une