Oliver Twist. Dickens Charles

Читать онлайн.
Название Oliver Twist
Автор произведения Dickens Charles
Жанр Зарубежная классика
Серия
Издательство Зарубежная классика
Год выпуска 0
isbn



Скачать книгу

leva un instant la tête, et éveilla son voisin en le tirant par la manche.

      «Ah! voici l'enfant? dit le vieux monsieur.

      – Oui, monsieur, répondit M. Bumble. Saluez le magistrat, mon ami.

      Olivier s'arma de courage et salua de son mieux. Les yeux fixés sur la perruque poudrée des magistrats, il se demandait s'ils venaient tous au monde avec cette étoupe blanche sur la tête, et si c'était à cela qu'ils étaient redevables d'être magistrats.

      «Eh bien! dit le vieux monsieur, je suppose qu'il a du goût pour l'état de ramoneur?

      – Il en raffole, Votre Honneur, répondit Bumble en pinçant sournoisement Olivier, pour lui faire comprendre qu'il ne devait pas dire le contraire.

      – Il veut être ramoneur, n'est-ce pas? demanda le vieux monsieur.

      – Si demain on voulait lui faire embrasser un autre état, il se sauverait immédiatement, répondit Bumble.

      – Et voici l'homme qui doit être son maître? Vous, monsieur? Vous le traiterez bien, n'est-ce pas? Vous le nourrirez, enfin vous en aurez bien soin? dit le vieux monsieur.

      – Quand je dis oui, c'est oui, répondit M. Gamfield d'un air rébarbatif.

      – Vous avez le ton brusque, mon ami, mais vous avez l'air d'un honnête homme plein de franchise, dit le vieux monsieur en tournant ses lunettes vers le candidat à la prime de cinq livres sterling, dont l'extérieur hideux respirait la cruauté; mais le magistrat était presque aveugle et moitié en enfance: aussi ne pouvait-on s'attendre qu'il vit aussi clair que tout le monde.

      – Je m'en flatte, monsieur, dit M. Gamfield avec un affreux sourire.

      – Je n'en doute pas, mon ami, répondit le vieux monsieur en affermissant ses lunettes sur son nez et en cherchant des yeux l'encrier.

      C'était le moment critique de la destinée d'Olivier. Si l'encrier s'était trouvé à la place où le vieux monsieur le cherchait, il y eût trempé sa plume, il eût signé l'acte d'apprentissage, et Olivier eût été emmené sur l'heure. Mais le hasard voulut que l'encrier fût précisément sous son nez, et qu'il le cherchât des yeux de tous côtés sans l'apercevoir. Pendant cette recherche, il jeta les yeux en face de lui, et son regard rencontra la figure pâle et bouleversée d'Olivier Twist, qui, en dépit des coups d'oeil significatifs et des pinçons de Bumble, considérait l'extérieur affreux de son futur maître avec une expression d'horreur et de crainte, trop visible pour échapper même à un magistrat à demi aveugle.

      Le vieux monsieur s'arrêta, posa sa plume et regarda M. Limbkins qui prit une prise de tabac, en affectant un air de gaieté et d'indifférence.

      «Mon enfant,» dit le vieux monsieur en se penchant sur le bureau.

      Olivier tressaillit à cette parole, et on peut excuser son trouble, car ces mots étaient dits d'un ton bienveillant, et un bruit inconnu effraye toujours; il trembla de tout son corps et fondit en larmes.

      «Mon enfant, dit le vieux monsieur, vous avez l'air pâle et épouvanté; pourquoi cela?

      – Éloignez-vous un peu de lui, bedeau, dit l'autre magistrat en posant son journal et en se penchant vers Olivier d'un air d'intérêt. Voyons, mon enfant, qu'avez-vous? n'ayez pas peur.»

      Olivier tomba à genoux, et, joignant les mains, supplia les magistrats d'ordonner qu'on le ramenât au cachot, disant qu'il aimait mieux mourir de faim, être battu, être tué même, si on voulait, plutôt que d'être remis à cet homme qui le faisait trembler.

      «Bien! dit M. Bumble levant les yeux et les mains de l'air le plus majestueux. Bien, Olivier! De tous les orphelins rusés et trompeurs que j'aie jamais vus, tu es bien un des plus effrontés.

      – Taisez-vous, bedeau, dit le second magistrat, quand M. Bumble eût achevé ce superlatif.

      – Je demande pardon à Votre Honneur, dit M. Bumble, qui ne pouvait en croire ses oreilles; est-ce à moi que s'adresse Votre Honneur?

      – Oui, taisez-vous.»

      Bumble demeura stupéfait: ordonner à un bedeau de se taire! c'était le monde renversé!

      Le vieux monsieur à lunettes d'écaille regarda son collègue, et lui fit un mouvement de tête qui témoignait de son approbation.

      «Nous refusons notre sanction à cet acte d'apprentissage, dit le magistrat, et en même temps il jeta de côté la feuille de parchemin.

      – J'espère, balbutia M. Limbkins, j'espère que, sur le témoignage sans valeur d'un enfant, les magistrats ne suspecteront pas la conduite des autorités.

      – Les magistrats ne sont pas appelés à se prononcer sur ce sujet, dit d'un ton bref le vieux monsieur; reconduisez cet enfant au dépôt et traitez-le bien, il paraît en avoir besoin.»

      Le soir même, le monsieur au gilet blanc affirma de la manière la plus nette et la plus formelle qu'Olivier, non seulement se ferait pendre, mais écarteler par-dessus le marché. M. Bumble hocha la tête d'un air sombre et mystérieux et dit qu'il souhaitait que l'enfant tournât bien; à quoi M. Gamfield répondit qu'il aurait souhaité que l'enfant lui fût confié. Ce souhait semblait en contradiction directe avec celui du bedeau, bien que Bumble et Gamfield fussent d'accord sur beaucoup de points.

      Le lendemain matin, le public fut informé de nouveau qu'Olivier Twist était encore à louer, et que quiconque voudrait s'en charger recevrait cinq livres sterling.

      CHAPITRE IV. Olivier trouve une place et fait son entrée dans le monde

      Dans les grandes familles, quand un jeune homme prend des années et qu'on ne peut lui obtenir une place avantageuse par achat, succession, réversibilité ou survivance, on a coutume de l'envoyer sur mer. Le conseil d'administration, pour suivre un exemple si sage et si salutaire, délibéra sur l'opportunité d'embarquer Olivier Twist à bord de quelque bâtiment marchand en destination d'un bon petit port bien malsain. Ce parti semblait aux administrateurs le meilleur que l'on pût suivre; il était probable en effet que le patron s'amuserait un jour après son dîner à fouetter l'enfant jusqu'à ce que mort s'ensuivit, ou à lui faire sauter la cervelle avec une barre de fer; on sait que pour les gens de cette classe ce sont là deux passe-temps ordinaires qui ne manquent pas d'agrément. Plus le conseil envisageait la chose à ce point de vue plus il y trouvait d'avantage. La conclusion fut que le seul moyen d'assurer l'avenir d'Olivier était de l'embarquer sans délai.

      M. Bumble avait été dépêché pour faire quelques recherches préliminaires, afin de découvrir un capitaine ou autre qui voulût d'un mousse auquel âme qui vive ne s'intéressait; il revenait au dépôt de mendicité pour rendre compte du résultat de sa mission, quand il rencontra à la porte l'entrepreneur des pompes funèbres da la paroisse, M. Sowerberry en personne.

      M. Sowerberry était un homme grand, maigre, fortement charpenté, vêtu d'un habit noir râpé, avec des bas de coton rapiécés de même couleur et des souliers à l'avenant. La nature n'avait pas donné à sa physionomie une expression souriante; mais, comme il trouvait dans son métier ample matière à plaisanterie, sa démarche était pour ainsi dire élastique et sa figure enjouée, quand il aborda M. Bumble et lui donna une cordiale poignée de main.

      «Je viens de prendre la mesure des deux femmes qui sont mortes la nuit dernière, monsieur Bumble, dit l'entrepreneur.

      – Vous ferez fortune, monsieur Sowerberry, dit le bedeau en introduisant le pouce et l'index dans la tabatière que lui présentait l'entrepreneur, laquelle offrait ingénieusement l'image d'un petit cercueil breveté, sans garantie du gouvernement. Je vous dis que vous ferez fortune, monsieur Sowerberry, répète M. Bumble en lui donnant amicalement sur l'épaule un léger coup de canne.

      – Vous croyez? dit l'entrepreneur d'un ton qui ne voulait dire ni oui ni non; les prix fixés par l'administration sont bien minces, monsieur Bumble.

      – Et vos cercueils aussi,» répondit le bedeau d'un air qui approchait de la plaisanterie, autant qu'il convenait à un fonctionnaire important.

      M. Sowerberry fut