Les Néo-Ruraux Tome 1: Le Berger. Wolfgang Bendick

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Название Les Néo-Ruraux Tome 1: Le Berger
Автор произведения Wolfgang Bendick
Жанр Сделай Сам
Серия Les Néo-Ruraux
Издательство Сделай Сам
Год выпуска 0
isbn 9783750218888



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entendu les mésaventures de nos pintades, il me proposa un fusil avec double canon et diverses cartouches, de la grenaille pour le renard, du gros calibre pour les sangliers. Mais d’abord il fallait créer un champ de tir dégagé. Avec une hache et la tronçonneuse je m’attaquais aux broussailles. Avec peu de succès, car je ne pouvais pas approcher suffisamment des petits troncs et bientôt j’avais des épines partout dans la peau. Quand je voulus les enlever, elles cassèrent. J’essayais alors de les sortir avec une aiguille. En vain. Il y en avait qui étaient rentrées si profondément, qu’il fallut des semaines pour qu’elles finissent par sortir avec plein de pus. Je devais changer de méthode ! A la foire j’avais vu des « débroussailleuses » à moteur proposées par des vendeurs de machines agricoles. J’avais déjà vu un tel engin au travail et j’étais convaincu que c’était la machine idéale pour notre ferme ! Je choisis un modèle qui était aussi transformable en tronçonneuse. Comme couteau je choisis une lame triangulaire pour les ronces, et une lame de scie circulaire pour couper les troncs des épines noires sans difficulté à hauteur du sol. Sous le chant de la machine, les buissons se réduisaient petit à petit et je trouvai même les nids des pintades ! Afin de ne plus attraper d’épines j’entassai les petits troncs à l’aide d’une fourche à fumier. Mais le tas ne voulait pas prendre feu. Alors on décida de tout laisser sécher et de repousser l’incinération à la Saint Jean. Deux des pintades disparues firent leur réapparition. Avaient-elles appris à passer la nuit dans les arbres ? Apparemment le renard n’avait pris que celles qui couvaient ! Je réussis plusieurs fois à les attraper la nuit et à les enfermer au poulailler. Mais elles préféraient dormir à la belle étoile. Comme moi, d’ailleurs, quand j’en avais l’occasion. Rien de plus émouvant que de se réveiller la nuit sous le scintillement de l’infini !

      *

      Il nous fallait d’urgence un chien ! Comme chien de garde pour la maison, surtout pour nous avertir de l’arrivée de Jean-Paul, contre le renard et comme chien de troupeau. Quand je voyais un bon chien travailler avec un troupeau j’étais envieux. Parfois le père ou la mère de Jean-Paul montait chez nous. Il y avait toujours quelqu'un du clan dans le coin. Bien sûr, ils avaient parfois des bêtes dans les environs. Mais il me semblait que celles-ci leur servaient d’alibi. Nous étions la vraie raison de leur présence ! Ils étaient assis quelque part et nous regardaient, nous scrutaient même avec les jumelles. Souvent c’étaient leurs chiens qui les trahissaient quand ils tournaient autour de leur observatoire. Les parents de Jean-Paul nous apprenaient par bribes plus de détails sur la vie de leur fils. Ça ne tournait pas rond dans sa tête. On l’avait enlevé très tôt à ses parents et mis sous la tutelle d’une tante. Il n’avait jamais fréquenté l’école et avait passé plusieurs années dans une institution psychiatrique. Ils avaient réussi à le faire déclarer irresponsable pour qu’il reçoive une pension. « Quand nous ne serons plus, il n’aura pas besoin de travailler… » Il ne devait pas boire d’alcool, car il prenait des médicaments. Cela expliquait pourquoi on ne le voyait pas souvent au café. Sans doute que l’hôtelier avait reçu des consignes ! Avant de connaître tous ces détails, il ne nous était pas apparu comme l’idiot du village. Bien sûr, on voyait qu’il n’était pas le plus brillant, mais concernant ses connaissances des animaux il était imbattable ! Bientôt nous nous rendîmes compte qu’il possédait assez de ruse paysanne, qu’il était assez malin pour exploiter à son avantage sa réputation d’être le fou du village !

      C’était encore lui qui avait entendu dire que dans une vallée en direction de l’Espagne, quelqu’un avait un jeune chien de troupeau à donner. Voulait-il simplement aller se promener ? Car il me dit qu’il avait le temps et m’accompagnerait. Alors nous nous mîmes en route. D’abord par-dessus le Col de Portet d’Aspet, puis, une fois en bas, nous nous dirigeâmes vers le sud et plus tard nous remontâmes une vallée par une route en lacets. En hauteur, une station de ski était en construction. Les panneaux indiquaient « Le Mourtis ». Peu avant, nous bifurquâmes dans une petite vallée, et la route se transforma en un chemin délavé et traversa une forêt de grands hêtres. Au seul endroit un peu large étaient garées quelques voitures et épaves. « Ça devrait être par-là, j’ai déjà été ici ! », dit-il et nous garâmes le combi. Nous montâmes un sentier en zigzag en suivant un câble en acier qui servait comme monte-charge. Au terminus du câble se trouvait une vieille maison. Là vivaient des jeunes gens en communauté. Ils avaient une petite douzaine de vaches suisses et fabriquaient du fromage. Ils possédaient aussi quelques brebis, pour mieux utiliser les terres, comme ils l’expliquèrent. Ils étaient en train de fumer un joint et nous l’offrirent. Nous refusâmes. On commença à parler chiens. Ils nous avaient salués en arrivant, des petites bêtes maladroites et mignonnes, qui essayaient de grignoter nos chaussures.

      Nous regardâmes leur téléférique et leur expliquâmes notre système. Derrière la maison le terrain était plus plat. Leur problème majeur était de ne pas avoir accès à la route. Et de ne pas être branchés au réseau d’eau publique. C’était la raison pour laquelle ils ne pouvaient pas vendre leurs fromages officiellement. « Quelque réglementation européenne, mise en avant par les grandes entreprises ! De mémoire d’homme les gens ont toujours bu aux fontaines. Et tout à coup c’est interdit ! Probablement parce qu’entre-temps ailleurs tout est devenu tellement pollué qu’on ne peut plus boire l’eau de source ! Le grand business de l’avenir ! », expliquèrent-ils. Mais jamais quelqu’un ne viendrait contrôler ça. Les chiots nous avaient suivis pendant notre visite de la ferme. « Choisis-en un ! Cela en fera déjà un de moins ! » Je choisis un mâle, bien que Jean-Paul affirmât qu’une chienne serait mieux. Je leur donnai 50 francs même s’ils ne demandaient rien. Le chiot dans mes bras nous entamâmes la descente.

      Dans la voiture je demandai à Jean-Paul ce qu’il pensait du chien. « Tu as vu ses pattes ? Il deviendra bien grand ! En tout cas, les parents sont de bons chiens ! Tu as vu comment ils ont fait avec les vaches ? C’est bien, quand un petit chien n’a pas peur. Je ne sais pas si tu l’as entendu, mais quelqu’un a dit que la mère du petit avait déjà tué des moutons. Ça peut être dans le sang, mais pas obligatoirement. Surveille le bien, afin qu’il n’y aille pas trop fort, surtout qu’il ne goûte jamais de sang ! » « Qu’est-ce que ça veut dire ? » voulus-je savoir. « Eh bé, qu’il ne blesse jamais un animal pendant son travail, de telle sorte qu’il saigne ! Et ne lui donne jamais de la viande crue à manger, surtout pas des animaux qu’il doit garder ! Quand tu tues une brebis ne lui donne jamais les intestins à manger, ni d’autres déchets. Enterre-les toujours assez profond que le chien ne puisse pas les sentir. S’il les déterre une fois pourris, c’est pas grave ! » Certes, pour l’instant il n’était encore qu’une boule de poil innocente avec laquelle les enfants aimaient beaucoup jouer.

      *

      Tant que les vaches étaient encore dans l’étable pendant la nuit, nous les trayions à l’intérieur. Bien sûr, les enfants étaient toujours avec nous ou quelque part en vue. Ils s’exercèrent aussi aux pis. Heureusement les vaches se laissaient faire ! Notre fils réussit le premier à faire sortir une goutte de lait, bientôt même un petit jet du pis. D’abord il dirigea le jet dans sa bouche, plus exactement en plein dans la figure. Il s’essuya en riant. Ça lui donna l’idée d’asperger sa petite sœur qui décampa vite en pleurant.

      Un jour nous avions dû traiter les chèvres contre la gale avec la sulfateuse. Elles perdaient leur poil et nous avions demandé ce qu’il fallait faire au vétérinaire. Il nous avait donné un produit à base de thym. En tout cas il ne sentait pas mauvais. Néanmoins nous ne voulions pas avoir les enfants à proximité et nous les envoyâmes jouer devant la maison. Doris tenait les animaux pendant que je leur passais le produit. Quand, après une demi-heure, ayant fini avec les bêtes, nous passâmes devant la maison, il n’y avait plus qu’Emanuel qui jouait dans le sable. Il ne savait pas où était passée sa petite sœur. Nous eûmes très peur ! Par où pouvions-nous commencer à la chercher ? À ce moment-là Jean-Paul, tout essoufflé, monta la côte en courant. « Votre petite est en bas à côté du pont du ruisseau ! J’ai voulu la monter avec ma mobylette, mais elle n’a pas voulu ! » Nous lui demandâmes de rester avec le gamin, descendîmes la colline en courant et puis nous nous précipitâmes vers