" A qui lira ": Littérature, livre et librairie en France au XVIIe siècle. Группа авторов

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Название " A qui lira ": Littérature, livre et librairie en France au XVIIe siècle
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Жанр Документальная литература
Серия Biblio 17
Издательство Документальная литература
Год выпуска 0
isbn 9783823302285



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apportés au texte original italien dans la traduction anonyme (soulignés ci-dessus), fait voir aisément que le traducteur, pour remplir les douze syllabes de l’alexandrin, fait appel à des adjectifs et des adverbes mélioratifs qui tirent l’original vers le haut et le rendent plus convenable aux circonstances de sa représentation. Tout se passe comme si, dans le livre des Nozze di Peleo et dans celui d’Ercole Amante, la traduction tâchait de corriger non pas le sens, mais le registre du texte dramatique. La publication de ce dernier aurait alors pour fonction de procurer à ces spectacles, dans la durée du souvenir fixé par le livre commémoratif, quelque chose de la noblesse de la tragédie chantée, telle qu’on était capable alors de la rêver après Andromède. Et comme, à la différence de la fête théâtrale de 1650, le message politique des fêtes de 1654 et 1662 était entièrement porté par les entrées de ballets et les vers que Benserade avait composés à leur effet, le texte dramatique pouvait se contenter de suggérer superficiellement le décorum d’une fête royale26.

      Les concessions faites au goût de l’enfant-roi (ballet d’animaux de la Finta pazza) et aux habitudes de la cour (multiplication des apothéoses et des entrées de ballet dans les Nozze di Peleo et Ercole amante), le faste des décors, des costumes et des effectifs musicaux, communiquèrent plus efficacement la magnificence de la cour de France sous la régence et le début du règne de Louis XIV, que les vers imprimés de l’abbé Buti ; mais une voie était désormais ouverte, où s’engageraient Molière et Quinault, dont les poèmes dramatiques seront parfois, mais pas toujours, imprimés dans les relations officielles des fêtes de cour de Louis XIV.

      Imprimer des prologues théâtraux au début du XVIIᵉ siècle. Le cas des recueils du farceur Bruscambille

      Flavie KERAUTRET

      Université Paris Nanterre

      Dans le premier tiers du XVIIᵉ siècle, alors que l’essor de la publication imprimée du théâtre en est encore à ses prémices, que le statut des écrivains n’est pas stable ni reconnu – et qui plus est celui des dramaturges, contraints de céder temporairement l’exclusivité de leurs pièces à la troupe qui les interprétait –, sont édités massivement les prologues du comédien Jean Gracieux. Ces discours sont rapidement regroupés sous le pseudonyme de Bruscambille, un nom de scène qui va peu à peu envahir les pages de titre de ses ouvrages. Nous connaissons peu de choses de ce farceur qui apparaît par intermittence comme membre des « comédiens ordinaires du roi » dans certaines minutes notariales1. Ses recueils de monologues, qui restent les traces les plus importantes de son activité, le présentent comme un « comédien » adoptant le surnom de « Des Lauriers » pour les rôles sérieux2. Ces prologues se présentent comme des discours destinés aux planches du théâtre, comme des tirades visant à être prononcées pour capter l’intérêt des spectateurs, notamment ceux de l’Hôtel de Bourgogne, avant la représentation de pièces plus longues. Mis en série, sans les pièces qu’ils introduisaient à l’origine, ces monologues sont édités avec succès puisque l’on compte 43 éditions entre 1609 et 1635, date à partir de laquelle les réimpressions se tarissent. Ces harangues aux sujets et tonalités variés abordent volontiers des thématiques telles que le cocuage, l’avarice, la folie…, auxquelles elles réservent un traitement souvent comique, et se nourrissent entre autres des codes de l’éloge paradoxal, du galimatias ou du plaidoyer satirique.

      Ce succès de librairie prétend trouver ses racines sur scène en portant encore la marque de ce cadre de production au sein des titres mais aussi des textes eux-mêmes avec les annonces de l’entrée en scène des acteurs de la pièce suivante et surtout à travers l’allure orale et spectaculaire de ces prises de parole couchées sur le papier3. Pouvons-nous, dès lors, considérer ces prologues comme des productions théâtrales, compte tenu de leur formidable réussite dans le domaine de l’imprimé ? Ces écrits cherchent-ils à programmer une consommation et une réception similaire à celle du théâtre imprimé à l’époque ? Si nous considérons, avec Roger Chartier4, que les choix de formats et de mise en page tendent à caractériser les écrits et à programmer leur lecture, la piste de la matérialité est susceptible de nous éclairer sur ce point. Nous pouvons tenter de rapprocher les ouvrages du farceur de ceux que l’on classe communément parmi le théâtre imprimé pour voir s’ils correspondent à ces modèles. Il s’agit ici de reconsidérer les productions de Bruscambille et de se pencher sur le phénomène éditorial qu’ils ont constitué en le replaçant dans une histoire culturelle et dans une histoire du théâtre imprimé5. Pour ce faire, nous comparerons le théâtre et les recueils de prologues de Bruscambille en tant que « phénomènes incarnés6 » et nous tâcherons de voir si ces ouvrages disposent des mêmes réseaux de diffusion. Les observations effectuées permettront sans doute de repenser les classifications et les hiérarchies dans lesquelles sont pris les prologues de Jean Gracieux. L’objectif n’est donc pas de traquer ici une intention auctoriale mais d’analyser un geste éditorial pour le situer dans la sphère de l’imprimé, théâtral peut-être.

      Les prologues de Bruscambille et le théâtre imprimé entre 1609 et 1615 : échantillon d’observation

      Comment se présente le théâtre imprimé dans le premier tiers du XVIIᵉ siècle et les recueils de Bruscambille correspondent-ils à ce modèle de publication ? Pour répondre à cette question, nous adopterons une optique comparative que nous bornerons de deux manières : géographiquement, en ne nous préoccupant que du domaine français, et temporellement, en nous focalisant sur une période très brève, 1609-1615. Cet empan chronologique restreint a donc valeur d’observatoire pour un cas spécifique. Il permettra de proposer une photographie précise des années correspondant à la parution des nouveautés de Bruscambille1. Malgré un contexte d’expansion généralisée de l’imprimé, l’essor du théâtre dans ce domaine est encore très relatif et ne se développera réellement que dans les années 1630, ce qui explique le caractère modeste des chiffres sur lesquels nous allons nous appuyer2.

      Le « Répertoire du théâtre imprimé au XVIIᵉ siècle3 », base de données réalisée par Alain Riffaud, permet de lister les pièces imprimées entre 1609 et 1615, dates entre lesquelles nous comptons seulement 68 notices (dont 45 nouveautés), ce qui est peu à l’échelle de la France et pour une période de six ans. À l’inverse, nous dénombrons dans les mêmes conditions 16 éditions des discours de Bruscambille, ce qui est considérable pour un seul et même auteur4. À première vue, les publications du farceur et le théâtre imprimé se présentent de manière analogue puisque l’on a dans les deux cas exclusivement des petits formats (principalement in-12 et in-8°), conformément à la tendance générale de l’imprimé à cette époque5. Ces deux types de production doivent être peu coûteux, maniables et accessibles au plus grand nombre. Parmi les comédies répertoriées, nous rencontrons encore beaucoup d’ouvrages où le texte apparaît de façon continue, la présentation typographique dramatique n’étant pas encore unifiée. Nombre de ces pièces sont presque dépourvues de blancs typographiques, seules les initiales des personnages placées en début de ligne permettent de distinguer les tours de paroles. En fonction, notamment, des exigences d’économie de papier, les lecteurs sont confrontés à des pages denses aux marges généralement serrées parce qu’elles ont été rognées, des pages similaires à celles qu’ils rencontrent en abordant les ouvrages de Bruscambille. Cet effet visuel est particulièrement flagrant lorsque l’on compare ces discours avec les prologues d’autres pièces, qui sont en majorité des monologues. Seule la disposition diffère alors, en raison de l’opposition formelle entre la prose maniée par le farceur et les vers adoptés par la plupart des prologues dramatiques.

      À la charnière de ce qui rapproche et éloigne les ouvrages de Bruscambille et le théâtre imprimé se trouvent les paratextes de ces livres que nous pouvons classer en deux types. D’un côté se situent les paratextes non spécifiques au théâtre, présents dans les deux sortes d’ouvrages : pages de titre, dédicaces, avis aux lecteurs et poèmes d’hommage sont autant d’éléments qui interviennent dans la présentation ou la légitimation des textes concernés. De l’autre côté, nous observons